Grâce au fonds de solidarité COVID-19 de l’Internationale de l’Éducation, les deux affiliés de celle-ci en Mauritanie ont pu entreprendre une série de tournées conjointes dans les écoles pour aller à la rencontre des enseignant·e·s. Cette initiative améliore l’image syndicale et permet d’accroître le nombre de membres des syndicats.
Renforcement syndical
Au-delà des mesures d’urgence mises en œuvre afin de garantir la santé et la sécurité des enseignant·e·s et des étudiant·e·s, le syndicat National de l’Enseignement Fondamental (SNEF) et le Syndicat National de l’Enseignement Secondaire (SNES) ont décidé d’agir ensemble pour renforcer leurs syndicats sur le long terme. Ils ont pour cela décidé d’intensifier les campagnes syndicales afin d’élargir les bases des deux syndicats, à travers des visites de terrain.
Hamadou Diallo, Secrétaire Général du SNEF, explique : « Avant le projet, notre principal contact avec les enseignants et enseignantes était par des assemblées générales que nous organisions, dans les grandes villes. Nous invitions les enseignants à venir au siège, pendant les vacances ou à la fin de chaque trimestre, mais peu de personnes répondaient à ces invitations. Grâce au soutien de l’Internationale de l’Éducation et de la Fédération Canadienne des Enseignantes et des Enseignants, nous avons pu aller, plus qu’auparavant, à la rencontre des enseignants, dans les écoles. »
Des équipes de deux militant·e·s syndicaux ·ales ont ainsi été constituées, dans toutes les circonscriptions de la capitale Nouakchott, ainsi qu’à Kiffa et Kaédi. Le SNEF et le SNES ont alors commencé par réunir tou·te·s ces militant·e·s, avant d’entamer les visites. Ces derniers·ères ont ensuite utilisé leurs jours de repos pour effectuer les tournées dans les écoles. Les récréations ont été mises à profit pour rencontrer les enseignant·e·s en salle des professeur·e·s, leur apporter des documents et recueillir leurs questions.
Connaissance des préoccupations des éducateur·trice·s sur le terrain
De plus, chaque équipe rédigeait un petit compte-rendu après chaque visite. Ces visites, très appréciées, ont confirmé les principales préoccupations des enseignant·e·s : affectations, avancement, salaires et indemnités, ainsi que des questions sur ce que le syndicat peut apporter.
« Nous avons constaté que certains enseignants n’ont pas eu d’avancement pendant dix ans, et n’ont rien réclamé ! Nous avons l’intention de poursuivre ces visites, qui améliorent beaucoup l’image de notre syndicat et ont d’ores et déjà permis d’augmenter le nombre de cotisants », a souligné Diallo.
Revenant sur les commentaires des enseignant·e·s lors des visites d’établissements, le secrétaire général du SNES, Sidi Idoumou Boudide, a quant à lui profondément déploré les pressions dont rapportées par des enseignant·e·s et exercées par des directeur·trice·s scolaires pour les dissuader d’adhérer à un syndicat. Dans certains cas, des enseignant·e·s ont été menacé·e·s de mesures punitives liées à l’action syndicale.
Nécessaire information sur les droits syndicaux et au travail
Pour Boudide, les questions de certain·e·s enseignant·e·s rencontré·e·s montrent la nécessiter de poursuivre les efforts d'explication sur le rôle d’un syndicat et de diffuser largement les informations de base sur les droits des enseignant.e.s. Il s’agit d’éclairer les éducateur·trice·s sur des questions telles que : « Les professeurs contractuels, les personnels d’encadrement ont-ils le droit d’adhérer aux syndicats et de suivre leurs mots d’ordre de grève ? » ou encore « Le ministère a-t-il le droit de retenir des jours de salaire pour raison de grève ? ».
L’impact désastreux de la crise de la COVID-19 sur les enseignant·e·s
La fermeture des écoles en Mauritanie à cause de la pandémie de COVID-19, le 16 mars 2020, a été accompagnée de la suspension des salaires des enseignant·e·s du secteur privé. La fermeture des routes et des frontières entre les différentes régions du pays a par ailleurs bloqué la plupart des éducateur·trice·s dans leur école.
Les syndicats insistent sur le fait que, privé·e·s des ressources provenant des écoles privées (dont l’essentiel des personnels sont les enseignant·e·s du secteur public), les enseignant·e·s se sont retrouvé·e·s dans le dénuement quasi-total, avec comme seule ressource le maigre salaire de la fonction publique.
Par ailleurs, les membres des syndicats sont resté·e·s presque entièrement coupé·e·s de leurs organisations. Les militant·e·s syndicaux·ales se sont habitué·e·s petit à petit à communiquer avec les membres par WhatsApp, mais peu d’enseignant·e·s étaient régulièrement connecté·e·s, et donc en mesure de partager des informations avec les autres non connecté·e·s et d’informer le syndicat sur des situations particulières. La déconnexion était encore plus grande pour les nombreux·euses enseignant·e·s non affillié·e·s aux syndicats.
Action syndicale immédiate pour rester en contact avec les membres
Avant que les autorités ne ferment les écoles, les syndicats ont suspendu les activités de protestation qui étaient programmées avant l’apparition de la pandémie (grèves, marches). Ils ont rencontré les ministres pour leur faire des propositions et leur soumettre des revendications liées à la situation des enseignant·e·s. Ils ont aussi organisé des sit-in pour réclamer l’ouverture des routes pour les enseignants bloqué·e·s afin de leur permettre de regagner leur milieu familial, et ont obtenu satisfaction sur ce point.
Ils ont ainsi cherché par tous les moyens à rester en contact avec les membres et ont pour cela mobilisé les coordinateur·trice·s régionaux·ales des syndicats afin d’apporter le maximum de soutien possible à tou·te·s les enseignants en difficulté.
L’Internationale de l’Éducation et la Fédération Canadienne des Enseignantes et des Enseignants poursuivront leur soutien financier aux affiliés mauritaniens pour l’étape suivante de leur plan d’action, à savoir l’amélioration de la communication de ces syndicats via leurs sites Internet respectifs.