Ei-iE

Nigeria : les syndicats d’enseignants demandent la libération immédiate des lycéen·ne·s après une nouvelle attaque contre un établissement scolaire

Publié 6 juillet 2021 Mis à jour 20 juin 2024
Abonnez-vous à nos newsletters

L’Internationale de l’Éducation condamne l’enlèvement de 140 lycéen·ne·s par des hommes armés dans l’État de Kaduna, au nord-ouest du Nigeria et exhorte les autorités publiques à assurer leur retour en toute sécurité auprès de leurs familles et de leurs communautés. L’Internationale de l’Éducation réaffirme que les écoles doivent être des havres de paix, exempts de violence et d’intimidation.

Au moins 140 lycéen·ne·s sont porté·e·s disparu·e·s et présumé·e·s enlevé·e·s après que des hommes armés ont pris d’assaut l’école Bethel Baptist dans l’État de Kaduna, au nord-ouest du Nigeria, où une vague d’enlèvements contre rançon touche de plus en plus d’élèves et d’étudiant·e·s dans la nation la plus peuplée d’Afrique.

Selon les médias, un leader chrétien local a déclaré que l’école comptait 180 élèves, dont 20 seulement ont été retrouvé·e·s. Il a toutefois ajouté que quelques élèves se sont peut-être échappé·e·s. Le 4 juillet, des assaillants armés ont également enlevé huit personnes, dont deux infirmières et un enfant âgé de 12 mois, au Centre national de formation sur la tuberculose et la lèpre à Zaria, à environ 80 km de Kaduna, d’après la BBC.

Ces enlèvements présumés constituent la quatrième attaque armée contre un établissement d’enseignement dans l’État de Kaduna au cours des cinq derniers mois et la troisième contre l’hôpital de Zaria. Depuis décembre, plus de 1.000 élèves ont été enlevé·e·s, neuf au moins ont été tué·e·s et plus de 200 sont toujours porté·e·s disparu·e·s – certain·e·s à peine âgé·e·s de trois ans – à la suite de raids similaires, toujours selon la BBC.

L’organe de presse a ensuite rendu compte d’un communiqué des forces de police de Kaduna indiquant que les hommes armés « avaient maîtrisé les agents de sûreté de l’école avant de pénétrer dans le pensionnat où ils ont enlevé et emmené dans la forêt un nombre indéterminé d’élèves ».

Le communiqué ajoute que 26 personnes, dont une enseignante, sont revenues depuis lors, alors qu’on ne sait rien de la situation des autres personnes disparues à l’école Bethel Baptist. La police nigériane a déclaré n’avoir encore reçu aucune demande de rançon à la suite de l’enlèvement présumé à l’hôpital.

Les éducateur·trice·s africain·e·s s’unissent pour lutter contre la violence à l’école

« Les enseignants et enseignantes, les personnels de soutien à l’éducation et les élèves sont en danger simplement en se rendant à l’école, car les groupes armés considèrent les écoles et les établissements d’enseignement supérieur comme des cibles adéquates », a expliqué le directeur de l’Internationale de l’Éducation pour l’Afrique, Dennis Sinyolo. « Les enlèvements fréquents dans les écoles nigérianes sont de nature à compromettre l’éducation de millions d’enfants », a-t-il ajouté.

Depuis que le groupe islamiste Boko Haram (qui signifie « l’éducation occidentale est interdite » en langue haoussa) a enlevé 276 écolières au lycée de Chibok dans l’État de Borno au Nigeria, en 2014, une affaire dont la presse s’est largement fait écho, les enlèvements contre rançon organisés par des groupes armés se multiplient dans les régions du Nigeria où la pauvreté, le chômage et la prolifération des groupes criminels et armés sont endémiques. La multiplication des enlèvements d’écolier·ère·s a conduit de nombreux parents à estimer que les écoles sont peu sûres, selon des informations complémentaires du Washington Post.

Le Comité Régional Africain de l’Internationale de l’Éducation (CRAIE) a noté avec préoccupation que les écoles de nombreux pays d’Afrique, notamment au Nigeria, ne sont pas les havres de paix qu’ils devraient être.

Dans une déclaration adoptée par le CRAIE en mai, les syndicats enseignants de la région ont réaffirmé leur solidarité avec le Syndicat nigérian des enseignants et ont appelé le gouvernement du Nigeria à prendre des mesures immédiates afin de prévenir les attaques et sécuriser les écoles dans tout le pays.

La déclaration souligne que « l’éducation est un droit humain fondamental qui doit être respecté quelles que soient les circonstances, et il est nécessaire de protéger les écoles et le droit des enfants à l’éducation ». Elle affirme que « la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage est conditionnée par un environnement d’apprentissage sûr, paisible, sécurisé, favorable et propice, qui garantit la sécurité et la santé de tous les enseignants et enseignantes et de tous les élèves », et que « les autorités en charge de l’éducation du continent ont le devoir de garantir des conditions favorables, confortables, sûres et sécurisantes pour toutes et tous ».

Résolution du Congrès mondial de l’Internationale de l’Éducation

L’Internationale de l’Éducation et ses organisations membres soulignent depuis de nombreuses années déjà la nécessité de considérer les écoles et les milieux éducatifs comme des sanctuaires sûrs pour les éducateur·trice·s et les élèves, en Afrique comme dans le monde entier.

Lors du 8e Congrès mondial de l’Internationale de l’Éducation qui s’est tenu à Bangkok, en Thaïlande, en juillet 2019, les délégué·e·s ont adopté une Résolution sur les attaques contre les écoles en Afrique. Dans ce document, il est demandé à l’Internationale de l’Éducation et à ses organisations membres en Afrique de faire pression sur leurs gouvernements pour, notamment :

  • Ratifier et domestiquer tous les instruments de prévention et de lutte contre le terrorisme en Afrique et mettre en place des mécanismes d’application de ces instruments ;
  • Signer, mettre en application et soutenir la Déclaration sur la sécurité dans les écoles afin de garantir que tous les élèves et enseignant·e·s, hommes et femmes, puissent apprendre et enseigner en toute sécurité ;
  • Enquêter systématiquement sur les attaques visant l’éducation et poursuivre les coupables ; et
  • Veiller à ce que l’éducation favorise la paix au lieu de susciter des conflits.

La Déclaration de 2009 intitulée « Les établissements scolaires doivent être des havres de paix » comprend également sept articles, chacun formulant un appel à l’action de la communauté mondiale. Ces articles sont les suivants :

  1. Réaffirmer l’engagement à respecter le principe du droit à l’éducation en toute sécurité
  2. Prendre des mesures concrètes en vue d’assurer la protection
  3. Mettre fin à l’impunité qui entoure les actes de violence à l’encontre des élèves, des enseignants et enseignantes, de l’ensemble des autres membres du personnel de l’éducation et des infrastructures éducatives
  4. Renforcer le contrôle des attaques et les mesures pour mettre un terme à l’impunité
  5. Accorder la priorité à l’action et échanger les expériences en termes de résilience et de reconstruction
  6. Faire de l’éducation un agent de la paix
  7. Soutenir les campagnes de solidarité