Le 4 janvier dernier, le Premier ministre britannique Boris Johnson a annoncé un nouveau confinement national en Angleterre, imposant de nouvelles restrictions dans l’ensemble du pays, telles que la fermeture des établissements scolaires, sauf pour les enfants du personnel essentiel et les enfants vulnérables, ainsi que la reprise immédiate de l’enseignement à distance.
Les syndicats de l’éducation du Royaume-Uni ont demandé de ne pas rouvrir les écoles le 4 janvier et ont réagi à l’annonce du Premier ministre – plusieurs élèves ayant repris l’école pendant une journée.
NEU : le gouvernement doit reconnaître sa négligence vis-à-vis des établissements scolaires et sa responsabilité dans leur fermeture
Dr Mary Bousted, co-secrétaire générale du National Education Union(NEU) et membre du Bureau exécutif de l’Internationale de l’Éducation, a déclaré : « La situation est critique pour le pays et une large part de ce qui nous amène à réagir ici n’est pas uniquement imputable à de nouvelles souches du virus ».
Elle a également rappelé que le gouvernement a disposé de huit mois pour se préparer à une nouvelle période d’apprentissage à distance et trouver des alternatives aux examens du GCSE (certificat général de l’enseignement secondaire de premier cycle) et du Niveau A (certificat de fin d’études secondaires). Elle a déploré que le gouvernement n’ait pas mis ce temps à profit : « Les autorités publiques ont ignoré l’accumulation des preuves démontrant la transmission de la COVID-19 aux professionnels de l’éducation dans les écoles et dans les foyers des élèves ».
Priorité aux élèves
Bousted a également précisé que, le 22 décembre, le Groupe consultatif scientifique pour les urgences (SAGE) avait indiqué aux ministres que même un confinement aussi strict que celui du printemps dernier ne suffirait pas à réduire le taux de reproduction (R) du virus et à le maintenir en dessous de 1. Comme elle le souligne : « Il est incompréhensible que, étant informé de cette situation, le Premier ministre ait pu réaffirmer, hier encore, que les écoles étaient sûres. Ce ne sont pas les paroles que l’on attend d’un dirigeant qui ‘suit les recommandations de la science’. »
Rappelant avec insistance que le gouvernement doit accorder la priorité aux élèves, elle a ajouté que beaucoup plus d’initiatives devraient être prises pour les élèves vulnérables : « Cette fois, le gouvernement ne peut plus tergiverser. Il doit garantir la sécurité de ces jeunes, leur assurer suffisamment de nourriture et leur apporter le soutien nécessaire au maintien de leur santé mentale. »
Devoir de diligence
Bousted a condamné l’absence de réponse du Premier ministre au plan de relance pour l’éducation proposé par son syndicat, comportant des recommandations concernant les mesures importantes à prendre pour protéger la santé, le bien-être et l’éducation des enfants et des jeunes. Elle a une nouvelle fois recommandé ce plan au Premier ministre Boris Johnson, réaffirmant que le NEU souhaitait « travailler avec le gouvernement pour obtenir de meilleurs résultats pour les enfants et les jeunes du pays en cette période de confinement. »
Elle a ajouté : « Ce gouvernement, qui a négligé les établissements scolaires, doit désormais prendre ses responsabilités et exercer son devoir de diligence, qui a fait cruellement défaut, envers ceux et celles qui ont travaillé héroïquement et sans relâche pour s’occuper des jeunes de notre pays ».
Dans sa conclusion, Bousted souligne : « Personne ne souhaitait une nouvelle fermeture des établissements scolaires, mais les faits démontrent clairement que cela aurait déjà dû avoir lieu il y a plusieurs semaines. Cela dépasse l’entendement de constater que Boris Johnson a laissé s’installer une telle confusion et un tel chaos concernant la réouverture des écoles avant de prendre cette décision tardive, dont l’évidence saute aux yeux. Le gouvernement doit assumer la responsabilité de cette fermeture des écoles car il a permis à la COVID-19 de redevenir incontrôlable. »
NASUWT : le confinement national est la seule réponse crédible à la haute contagiosité du nouveau variant du virus
Patrick Roach, secrétaire général de la NASUWT-The Teachers' Union, a déclaré : « Nous avons vu la situation se dégrader jour après jour. Elle est aussi mauvaise, sinon pire, qu’aux mois de mars et avril derniers. »
Soulignant que « le confinement national est la seule réponse crédible à la haute contagiosité du nouveau variant », il reconnaît que « le Premier ministre a pris la bonne décision en acceptant l’appel de la NASUWT à reprendre immédiatement l’apprentissage à distance pour l’ensemble des élèves du pays ».
Tout en déplorant les trop nombreux bouleversements dans la scolarisation des enfants, il a indiqué : « Sans mesures plus strictes, ces perturbations ne feront que se poursuivre. Limiter la propagation du virus est le seul moyen de s’assurer que les écoles pourront rester ouvertes en toute sécurité après les vacances de février. »
Protéger le personnel enseignant et les élèves
Roach reconnaît également que : « Le personnel enseignant a fait tout ce qui lui a été demandé. Mais il mérite, autant que les élèves, les mêmes niveaux de protection contre ce virus hautement mortel et contagieux. »
« Si nous souhaitons rouvrir nos écoles au mois de février sans nouvelles perturbations, nous devons tirer plusieurs leçons », a-t-il ajouté, soulignant que le gouvernement doit s’engager à travailler avec le secteur en vue de proposer des solutions crédibles, offrant une base durable pour l’enseignement et l’apprentissage en toute sécurité.
Il poursuit : « Il est extrêmement décevant de constater que le gouvernement n’a toujours pas ordonné le lancement prioritaire de la vaccination pour les écoles et le personnel de l’éducation. Protéger le personnel enseignant contre la COVID-19 est le meilleur moyen de s’assurer que la scolarisation des élèves ne sera plus perturbée à l’avenir. »
Relance de l’éducation
Roach a insisté sur le fait que le gouvernement devait mettre cette période de confinement à profit pour développer un plan de relance de l’éducation, accompagné d’un système de dépistage efficace géré par des équipes de santé publique, de mesures plus strictes pour prévenir la propagation du virus et d’un accès prioritaire à la vaccination pour le personnel de l’éducation.
Il a ajouté : « Vu l’importance des difficultés que nous rencontrons, le gouvernement a raison de rechercher des plans alternatifs pour les examens de cet été. Il est essentiel qu’il collabore avec la profession enseignante pour élaborer ces plans et ne répète pas les erreurs commises l’été dernier. Il doit également confirmer l’annulation des examens officiels pour les élèves de l’enseignement primaire. »
Solidarité syndicale et approche commune
Les deux affiliés de l’Internationale de l’Éducation ont signé une déclaration conjointe demandant une réouverture des écoles en toute sécurité en 2021, publiée le jour même de l’annonce du confinement.
Les autres signataires sont le GMB, un syndicat représentant le personnel des services publics et du secteur privé ; la National Association of Head Teachers(NAHT), une organisation professionnelle et syndicale au service des responsables d’établissement scolaire dans tous les secteurs de l’éducation en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord ; UNISON, un des plus grands syndicats britanniques représentant le personnel offrant des services publics dans le secteur public et privé ; et Unite, une organisation représentant le personnel de tous les secteurs de l’économie en Grande-Bretagne et en Irlande.
Les syndicats demandent également de suspendre momentanément la réouverture des écoles pour tous les enfants jugés non vulnérables ou les enfants des travailleur·euse·s essentiel·le·s et d’opter pour l’apprentissage à distance en attendant la mise en place de mesures de travail sécurisées et de protection contre la COVID-19. « L’ensemble du personnel des écoles devrait avoir un accès prioritaire à la vaccination contre la COVID-19 », insistent-ils.
Ils constatent que la gestion chaotique de la réouverture des écoles par le gouvernement britannique a semé la confusion parmi les enseignant·e·s, les personnels de soutien à l’éducation et les parents.
La déclaration souligne : « Ramener les élèves en classe alors que le taux de contamination est si élevé expose les personnels de l’éducation à de sérieux risques pour leur santé et pourrait favoriser une recrudescence de la pandémie. Au lieu d’affirmer à la hâte que les écoles sont sûres, le Premier ministre devrait consulter les syndicats en vue de définir une approche commune permettant de garantir des conditions de travail sécurisées dans toutes les écoles et permettre en priorité à tous les élèves d’accéder aux équipements et aux ressources nécessaires pour recevoir un enseignement à distance de haute qualité, jusqu’à ce que leur sécurité et celle des effectifs de leurs écoles puissent être garanties. »
Selon les syndicats, les plans visant à garantir la sécurité du personnel et des élèves dans les écoles doivent comporter les éléments suivants :
- Examiner les plans d’évaluation des risques et de protection contre la COVID-19 dans les écoles.
- Accorder la priorité, dans le cadre de la stratégie de vaccination, aux effectifs des écoles qui accueillent dans leurs établissements les enfants vulnérables et ceux du personnel essentiel.
- Fournir des équipements numériques et un soutien aux élèves qui en ont besoin pour leur permettre d’accéder à un enseignement à distance de haute qualité.
Le blog « Taking Action to Keep School Pupils, Staff and Communities Safe in England », publié par Mary Bousted et Kevin Courtney, est disponible ici.