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France: action syndicale unitaire en protestation à la coupe budgétaire de postes dans l'éducation

Publié 13 novembre 2018 Mis à jour 16 novembre 2018
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Pour la première fois depuis sept ans, les principaux syndicats de l’enseignement français ont appelé d’une seule voix à la grève le 12 novembre et manifester leur profond mécontentement suite à l’annonce par le gouvernement de la suppression de 2.650 postes d’enseignant(e)s et de 400 postes de personnels de soutien à l'éducation dans le secondaire pour la rentrée 2019.

Enseignant(e)s et personnels des écoles ont été appelé(e)s à la grève par la Fédération syndicale unitaire (FSU), l’Union nationale des syndicats autonomes-Education (UNSA-Education), le Syndicat national des enseignements de second degré (SGEN-CFDT) et le Syndicat national des lycées et collèges (SNALC).

Le SNUipp-FSU, syndicat du primaire, a estimé qu’un quart des enseignant(e)s n’ont pas fait école le 12 novembre, et le SNES-FSU, syndicat du secondaire, a quant à lui parlé de 50 % de grévistes dans les collèges et lycées.

Dans leur communiqué commun, les organisations syndicales ont rappelé que le gouvernement a prévu la diminution de 4.500 d’emplois de fonctionnaires d’état, 40 % de cette baisse étant supportée par la seule Education nationale.

Une absence de reconnaissance et une remise en cause de la professionnalité des personnels

Notant que « ces suppressions de poste sont décidées en même temps que le ministre présente son projet de loi pour l’école de la confiance », les syndicats ont insisté sur le fait que « la fin de la priorité budgétaire conjuguée aux changements de pieds incessants de politique éducative, au mode de pilotage vertical et aux mises en cause des résultats de l’école sont vécus comme une absence de reconnaissance et une remise en cause de la professionnalité des personnels ».

« Les actes et les mots ont du sens. Le ministre ne peut se prévaloir d’un objectif d’augmentation générale du niveau des élèves et de justice sociale, sans s’en donner les moyens », ont également expliqué les syndicats.

Pour eux, « le projet de loi de finances 2019 marque ainsi la fin de la priorité accordée à l’Education nationale en renouant avec la logique de suppressions de postes, une logique appelée à s’amplifier dans les années suivantes pour atteindre les 50.000 suppressions annoncées de fonctionnaires de l’Etat ».

Ils ont aussi prévenu qu’avec le redéploiement dans le primaire, les 2.650 suppressions de postes d’enseignant(e)s dans le second degré qui vont toucher les collèges et les voies générales, technologiques et professionnelles des lycées, et les 400 suppressions de postes de personnels administratifs, « les conditions d’apprentissage pour les élèves et de travail des personnels se dégraderont dès la rentrée prochaine pendant que l’administration du système, pour les élèves et leurs familles, comme pour la gestion des personnels sera mise en grande difficulté ».

Les organisations syndicales ont appelé dès lors les personnels « à exprimer leurs inquiétudes pour l’avenir de l’Ecole comme leur exaspération », et « à se mettre en grève et à participer aux manifestations et rassemblements prévus le 12 novembre pour demander au gouvernement un autre budget pour l’enseignement scolaire public et une politique éducative à l’écoute des personnels. »

UNSA Education: l' Education de la jeunesse n’est plus aujourd’hui la priorité

Notant une coupe « franche et nette », et un budget « incompatible avec l’ambition d’un enseignement de qualité », l’UNSA Education a insisté sur le fait que « même l’Enseignement Supérieur n’est pas préservé. L’augmentation de son budget est en trompe l’œil: les 500 millions d’euros seront insuffisants au regard des moyens nécessaires pour relever les défis auxquels nous sommes confrontés: accompagnement des étudiants, ouverture des places nécessaires, reconnaissance des personnels. »

« Déshabiller l’un pour habiller quelque peu l’autre est donc la boussole qui pilote le ministère de l’Education Nationale », a regretté le syndicat, ajoutant que « ce budget marque symboliquement une rupture dans la politique gouvernementale. L’Education de la jeunesse n’est plus aujourd’hui la priorité. »

Selon Stéphane Crochet, à la tête du SE-UNSA, membre de l’UNSA Education, c’est la première fois depuis 2011 qu’un appel à la grève sur une thématique éducation rassemble toutes les organisations syndicales, de la maternelle au lycée, dans le public et dans le privé.

SNES-FSU: un mécontentement profond

De son côté, le SNES-FSU a souligné qu’« avec près d’un  enseignant sur deux du second degré en grève ce 12 novembre 2018, c’est un mécontentement profond qui s’exprime », et que « l’ampleur des attaques contre la Fonction publique et plus particulièrement l’Education nationale explique cette forte réaction. »

« Il est grand temps de changer de politique pour maintenir un service public d’éducation respectueux des personnels et qui assure à tous les jeunes une formation et une qualification », a tenu à faire valoir le syndicat du secondaire.

SNUipp-FSU: une pseudopriorité donnée au primaire

Le SNUipp-FSU s’est de son côté montré particulièrement agacé d’« une pseudopriorité » donnée au primaire, affirmant que les postes créés sont loin de couvrir les besoins nés du dédoublement des classes de CP et CE1 en zone d’éducation prioritaire. Plus généralement, le syndicat critique la politique du Ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer, qui donne « le tournis » et créé « une école de la défiance », à l’encontre de « l’école de la confiance » voulue par le ministre.

SGEN-CFDT: intensification prévisible du travail des personnels et dégradation de leurs conditions de travail

Le SGEN-CFDT a également fortement mobilisé, faisant valoir que « le projet de  budget 2019 ne traduit pas une politique éducative ambitieuse et marque la fin de la priorité accordée à l’Education nationale. Les suppressions de postes et non-créations, alors que les missions sont nombreuses et importantes, vont intensifier le travail des personnels et donc dégrader leurs conditions de travail. » Il a vivement déploré que « la suppression de 400 postes administratifs pèserait lourdement sur le quotidien de collègues dont les conditions de travail se sont déjà fortement dégradées », et averti que   « les réorganisations répétées, les suppressions de postes antérieures, les sollicitations permanentes aboutissent à des dysfonctionnements préjudiciables à tous les personnels de l’Éducation nationale comme aux usagers du service public d’éducation ».

Les personnels « ne comprennent pas » les réductions d’effectifs dans le secondaire, au regard de la poussée démographique attendue en collèges et lycées, a souligné la Secrétaire générale du SGEN-CFDT Catherine Nave-Bekhti. Le Secrétaire national de la CFDT Laurent Berger a pour sa part évoqué l’exaspération « extrêmement profonde » des enseignant(e)s, qui « n’en peuvent plus ».