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"Si on peut dire, et on le peut, qu'en l'an 2020 le nombre de morts [causées par le VIH/SIDA] approchera du nombre de morts, civils et militaires confondus, des deux guerres mondiales du XXe siècle, alors on devrait dire aussi qu'une grande majorité de ces morts seront des femmes et des jeunes filles. Le coût pour les femmes et les jeunes filles va au-delà de l'imaginable; cela lance à l'Afrique et au monde un défi pratique et moral qui place le genre au centre de la condition humaine [...]" STEPHEN LEWIS, envoyé du Secrétaire général des Nations Unies pour l'Afrique pour les matières liées au VIH/SIDA, juillet 2002 Le quatrième Congrès mondial de l'Internationale de l'Education, réuni à Porto Alegre, Brésil, du 22 au 26 juillet 2004:

1. Note qu'en juin 2004, le monde a commémoré le 23ième anniversaire de la pandémie du VIH/ SIDA; que selon des estimations récentes d'ONUSIDA, 40 millions de personnes vivent avec le virus et que l'épidémie mondiale a causé 3 millions de morts en 2003.

2. Préoccupé par la dimension croissante de genre de la pandémie. On compte de plus en plus de femmes et de jeunes filles parmi les personnes vulnérables, infectés/ées, affectés/ées par le VIH/SIDA; en Afrique subsaharienne, la région la plus touchée, il est nettement plus probable - au moins 1,2 fois plus - que des femmes et des jeunes filles soient infectées plutôt que des hommes. Parmi les personnes qui ont entre 15 et 24 ans, la proportion est encore plus élevée.

3. Note que cela n'est pas simplement dû à leur condition de femmes, mais surtout aux inégalités et aux discriminations qui distordent et affectent pratiquement chaque aspect de leur vie. Des violences en tout genre et la crainte de la maltraitance peuvent intimider les femmes et les empêcher d'oser demander de meilleures relations affectives, de discuter de pratiques plus sûres avec leur partenaire et de cesser les pratiques à risque. La vulnérabilité est encore plus élevée là où les femmes et les jeunes filles ont peu de pouvoir de décision sur les aspects fondamentaux de leur vie. Le trafic d'êtres humains, la prostitution, y compris la prostitution infantile, les conflits armés, la pauvreté qui écrase les économies et appauvrit les familles, génèrent plus de violence basée sur le genre et augmentent les probabilités d'être touché par la pandémie.

4. Préoccupé par les situations extrêmement difficiles que peuvent en particulier affronter les femmes du corps enseignant affectées par le VIH/SIDA, à l'école, au syndicat et dans la société en général. Préoccupé aussi par la situation des étudiantes, des jeunes filles et des adolescentes.

5. Convaincu que les enseignantes affectées par le VIH/SIDA ne doivent pas être considérées comme des victimes, étant donné qu'elles peuvent faire partie des moyens mis en oeuvre pour combattre efficacement la discrimination et les stigmatisations auxquelles elles font face et qu'elles ont le droit de participer au développement de tels moyens.

6. Tenant compte du rôle fondamental que doit jouer l'éducation dans la prévention de toutes les formes de discriminations que peuvent rencontrer les femmes et les jeunes filles affectées par le VIH/SIDA. De nombreuses études réalisées au niveau national et international ont démontré que le manque d'éducation en général, dans les matières de la santé sexuelle et de la prévention du SIDA en particulier, accroît la vulnérabilité des femmes et ont également prouvé le rôle protecteur que pouvait avoir l'école.

7. Considérant de même la quantité et la qualité de l'information et l'expérience accumulée par l'Internationale de l'Education pendant les neuf dernières années à travers le programme qu'elle développe avec l'OMS et ONUSIDA.

Le quatrième Congrès mondial de l'Internationale de l'Education:

8. Appelle les gouvernements à prendre des mesures efficaces visant à: a. Assurer aux femmes et aux jeunes filles un accès égal et gratuit à une éducation publique de qualité, qui comprenne des programmes scientifiques et bien informés sur la sexualité humaine, en consultation étroite avec les syndicats enseignants;

b. Eviter que des femmes et des jeunes filles contractent le virus en leur assurant l'accès à une éducation sexuelle appropriée et aux soins que demande leur santé sexuelle;

c. Promouvoir la recherche en vue du développement de microbicides efficaces;

d. Faciliter l'accès aux préservatifs afin de réduire considérablement les risques de transmission du virus et de freiner la pandémie;

e. Réduire la violence contre les femmes et les jeunes filles à la maison, à l'école, sur les lieux de travail et dans la société en général, en mettant cette violence en rapport avec leur vulnérabilité au VIH/SIDA;

f. Réaliser des estimations nationales de la proportion de VIH/SIDA en fonction de données différenciées et ventilées par genre;

g. Sauvegarder les droits économiques des femmes et des jeunes filles en assurant leur droit à la propriété et à la succession dans le cadre des situations provoquées par le VIH/SIDA;

h. Combattre avec fermeté le trafic de femmes et de jeunes filles, le travail des enfants, les mariages forcés, l'exploitation sexuelle et économique, et toutes les formes de discrimination contre les femmes et les jeunes filles, qui accroissent leur vulnérabilité et peuvent contribuer à les exposer au VIH/SIDA.

9. Invite les organisations membres de l'IE à: a. Ne pas ménager leurs efforts et exhorter leur gouvernement à mettre en oeuvre une politique éducative et préventive comprenant une éducation sexuelle, dans une perspective de genre, et des programmes de formation des enseignants incluant des méthodologies appropriées pour l'éducation en matière de santé, de compétences pour la vie pratique et de VIH/SIDA;

b. Inclure dans les négociations collectives les matières liées à la dimension de genre du VIH/ SIDA et former les équipes négociatrices pour cela;

c. Développer des activités traitant spécifiquement des situations auxquelles font face les enseignantes affectées par le VIH/SIDA;

d. Appliquer avec fermeté la Déclaration sur l'éthique professionnelle de l'IE et agir pour faire de l'école un lieu sûr et sain, qui garantisse à tous et toutes la protection contre toute forme de discrimination, de harcèlement et de violence, un lieu convivial où il soit possible de vivre ensemble.

Rôle de l'IE

10. L'IE devrait: a. Renforcer sa collaboration avec des organisations internationales comme l'OIT, l'OMS, ONUSIDA, l'UNESCO, entre autres, qui s'attachent à la dimension de genre du VIH/SIDA;

b. Participer au niveau international et régional à des événements liés au genre et au VIH/SIDA;

c. Inclure la dimension de genre du VIH/SIDA dans les programmes de coopération au développement;

d. Développer des activités de formation pour assister les organisations membres dans tout ce qui concerne la dimension de genre de la pandémie.