Ei-iE

Togo : une campagne syndicale pour que l’éducation demeure une priorité

Publié 18 mars 2025 Mis à jour 18 mars 2025
Abonnez-vous à nos newsletters

Trouver des pistes pour assurer l’augmentation du financement public de l’éducation. Tel était l’enjeu de l’atelier de diagnostic et de planification au cours duquel la Fédération des Syndicats de l'Éducation Nationale (FESEN), l’affilié de l’Internationale de l’Éducation (IE) au Togo, a ainsi élaboré un plan d’actions pour 2025 visant à mettre en application les objectifs de la campagne « La force du public : ensemble on fait école ! ».

Un cadre syndical à améliorer

Lors de cet atelier tenu à Lomé, les 22 et 23 février 2025 grâce au soutien financier du syndicat suédois Swedish Teachers’ Union, la FESEN et les dix syndicats qui la composent ont fait savoir qu’ils évoluent dans un contexte syndical tendu, marqué par des difficultés à faire respecter les droits syndicaux. Ce qui amène le nouveau personnel dans la profession enseignante à hésiter fortement à se syndiquer. Il y a deux ans, ce sont aussi 1.394 directeur∙trice∙s d’école qui avaient été rétrogradé∙e∙s et affecté∙e∙s pour avoir participé à une grève lancée par la FESEN. À ce jour, même si la grande majorité a été réintégrée dans ses droits, 18 d’entre eux∙elles n’ont pas encore retrouvé leur poste (toutefois les discussions continuent avec les autorités de l’éducation pour leur réhabilitation). En fin 2025 sera par ailleurs évalué et rediscuté le Mémorandum d’entente qui a induit la trêve sociale de 5 ans, signée en 2021, dans le secteur de l’éducation au Togo.

Un cadre de dialogue social à redéfinir

La FESEN a expliqué opérer au milieu de sept autres fédérations de l’éducation. Faute de mécanisme pour évaluer la représentativité réelle des différentes fédérations et leur accorder la voix qu’elles méritent, les autorités peuvent ainsi s’appuyer sur des prises de position dites majoritaires pour apposer une onction syndicale sur leurs décisions. Le cadre de concertation en place apparaît donc insatisfaisant. Par ailleurs, les syndicats ne sont pas associés aux opérations de gestion des personnels, ce qui rend ces processus difficiles à cerner.

La force par l’indépendance financière

Dans ce contexte difficile, la FESEN a assuré néanmoins pouvoir s’appuyer sur un socle d’adhérent∙e∙s fidèles, dont les cotisations sont collectées par un mécanisme indépendant de prélèvements bancaires. Même si le revenu est modeste, cet atout permet à la FESEN de planifier ses activités de manière autonome, et a ainsi pu financer la construction et l’équipement de son siège sur fonds propres depuis trois ans. Les militant∙e∙s effectuent régulièrement des tournées dans les régions, pour y tenir des assemblées générales où peuvent s’exprimer les besoins de la base. Cette activité de terrain est l’occasion de convaincre de nouvelles personnes de rejoindre la FESEN.

La réforme de l’enseignement public

Pour la fédération syndicale, l’investissement public dans l’éducation au Togo est manifestement insuffisant même s’il est en constante augmentation. Ainsi, dans certaines localités, on note une forte présence d’écoles privées. Dans la galaxie d’écoles privées, une minorité est constituée d’écoles confessionnelles qui existent depuis des décennies – dont certain∙e∙s enseignant∙e∙s sont pris∙es en charge par l’État.

La FESEN a aussi reconnu que dans les écoles publiques, les salaires de la profession enseignante, malgré les réajustements, doivent encore être améliorés afin de rendre attractive la profession. Les conditions de travail sont souvent difficiles, avec des effectifs pléthoriques par classe.

Faute d’infrastructures suffisantes, le ‘double-flux’ a dû être instauré dans certaines écoles : un groupe d’élèves étudie le matin, puis un autre l’après-midi. Ceci a un impact sur la charge de travail des enseignant∙e∙s, car certain·e·s donnent cours aux deux groupes.

La FESEN en campagne pour l’École publique

La FESEN a donc décidé de s’organiser pour déployer la campagne de l’IE « La force du public : ensemble on fait école ! » au Togo, en structurant son action.

Elle entend élaborer un plaidoyer solide, basé sur une recherche qui va être effectuée par un.e chercheur∙euse indépendant∙e. Cet∙te expert∙e va être chargé∙e de rassembler des éléments chiffrés sur le paysage public/privé dans l’éducation, notamment en ce qui concerne le financement public. Le rapport de recherche servira de base pour que les équipes militantes de la FESEN, jusque dans les régions, acquièrent des notions solides sur la question centrale du financement de l’éducation et sur tous les enjeux qui s’y rapportent, notamment le recrutement, la formation, ainsi que les conditions de travail et de rémunération des personnels éducatifs.

En outre, la FESEN va s’entourer de partenaires pour appuyer son plaidoyer, à commencer par les organes des Nations Unies au Togo, qui vont être invités à plaider pour que les recommandations des Nations Unies soient prises en compte dans les politiques ministérielles en éducation.

Plusieurs de ces recommandations ont été identifiées comme cruciales lors de l’atelier de Lomé, notamment ‘la condition et la dignité de la profession enseignante’ qui ‘doivent être protégées et améliorées’ (recommandation 14), ‘la formation initiale de qualité des enseignant∙e∙s (…) financée par des fonds publics’ (recommandation 20) et ‘un dialogue social coordonné et institutionnalisé’ (recommandation 48).

Outre le renforcement de capacités des militant∙e∙s et le plaidoyer, la FESEN va déployer un plan de communication sur la campagne et parcourir toutes les préfectures du pays pour mobiliser la base syndicale.