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RDC: les cercles d’études, outil pour améliorer la qualité de l’éducation et développer le syndicalisme

Publié 3 mai 2019 Mis à jour 4 juin 2019
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Les syndicats de l’éducation affiliés à l’Internationale de l’Education en République démocratique du Congo ont évalué le programme basé sur les cercles d’études pour améliorer la qualité de l’enseignement et le syndicalisme dans les écoles.

L’Internationale de l’Education (IE) et ses organisations membres de République démocratique du Congo (RDC), à savoir la Centrale de l’Education Nationale et de la Recherche Scientifique(CSC-Enseignement), la Fédération nationale des enseignants du Congo (FENECO-UNTC) et le Syndicat des Enseignants du Congo (SYECO) ont procédé à une première évaluation-planification, après un an de fonctionnement du programme visant à l’unité syndicale et financé par la Centrale des syndicats du Québec (CSQ)/Canada, le Lärarförbundet/Suède et l’IE. Ce programme est basé sur les cercles d’études, ouvrant une culture du dialogue sur le lieu de travail pour résoudre des problèmes professionnels, un concept décliné sur tous les continents. En Afrique, il s’appelle PANAF (‘programme pan-africain’), un programme qui regroupe 18 pays francophones et anglophones.

Du 18 au 24 mars, l’évaluation a été effectuée dans trois régions sur six, à savoir Kinshasa, Matadi et Mbuji-Mayi, sous la forme d’un atelier d’une journée. Dans ces trois régions, les 30 animateur·rice·s étaient rassemblé·e·s pour procéder à un état des lieux des difficultés rencontrées, besoins, suggestions pour surmonter les problèmes, etc.

Le programme focalisé sur la formation de formateur·rice·s a commencé en mars 2017. Puis il a été déployé dans différentes régions, par étapes: en 2018, les trois premières régions, puis trois autres. Dans chaque région, 30 écoles ont été ciblées et dans chaque école, un·e animateur·rice syndiqué·e  a été formé·e en cinq jours, suivant un manuel.

Des bénéfices indéniables

Parmi les aspects positifs de cette méthode des cercles d’études, une participante à un cercle d’études de femmes a reconnu que « pour la première fois, j’ai pu prendre la parole à l’Eglise. »

Un participant à un autre cercle d’études a insisté sur le fait que « ça a amélioré les relations entre enseignant·e·s, ça nous a permis de nous connaître entre nous, et de nous connaître nous-mêmes. »

En effet, là où il n’y avait pas ou très peu de travail en équipe dans des écoles auparavant, ce programme a permis d’améliorer les relations professionnelles, de faire baisser les conflits entre enseignant·e·s et entre les enseignant·e·s et les directions d’écoles. Des améliorations sont apparues aussi dans d’autres contextes, par exemple dans les réunions pédagogiques et dans les salles de classe.

Les cercles d’études installent ainsi un dialogue bienvenu et favorisent le syndicalisme. Ainsi, les cercles d’études permettent de discuter des problèmes que vit le personnel enseignant et de chercher des solutions, comme cela se faisait dans la tradition africaine des arbres à palabres, et au début du syndicalisme : se réunir et compter sur ses propres moyens.

Parmi les principaux problèmes rapportés par les animateur·rice·s,  certain·e·s chef·fe·s  d’établissement craignent les syndicats et ont peur de ce type de réunion qu’ils ne connaissent pas. Donc il n’y avait pratiquement pas de vie syndicale dans certaines écoles auparavant, car ils·elles refusaient que les enseignant·e·s se réunissent. Par le dialogue et des réunions avec des responsables syndicaux·ales, certains blocages ont pu être levés, mais pas tous.

Une méthode basée sur un manuel

Les cercles d’études s’appuient pour leur organisation sur un manuel qui comprend deux volets.

Tout d’abord un volet sur la méthode elle-même. Il apparaît que cette méthode est rigoureuse, et sert tout d’abord à inculquer la culture du respect de la parole des autres, donner son avis, faire la synthèse, organiser les réunions de manière précise autour d’un agenda, avec un temps de réunion entre une fois par semaine et une fois par mois, avec un nombre de participants  maximal de 13 personnes, etc.

Il devrait être possible de prendre du recul par rapport à ce cadre. L’évaluation menée par l’IE, la CSQ et Lärarförbundet montre ainsi le besoin de souplesse pour s’adapter aux réalités locales, comme par exemple augmenter parfois le nombre de participant·e·s afin que certaines personnes ne se sentent exclues.

Le second volet du manuel est constitué d’un recueil d’informations spécifiques à l’éducation, au système éducatif, aux statuts du personnel enseignant , etc. Deux syndicats sur trois possédant déjà leur propre guide syndical, ces deux guides syndicaux ont été fusionnés pour devenir la deuxième partie du manuel.

Problématiques locales et nationales

Il convient par ailleurs de distinguer les problèmes locaux des problèmes nationaux.

Parmi les problèmes locaux, on peut trouver le manque de matériels scolaires dans l’établissement, des toilettes défectueuses, ou encore des conflits entre les enseignants et les parents d’élèves ou la direction. Ce type de questions peut être résolu localement par le dialogue.

En revanche, le programme scolaire, les salaires, les examens, les primes, la carrière enseignante, la protection sociale, les pensions, sont autant d’exemples de sujets d’envergure nationale.

Des problématiques peuvent être transversales, à la fois locales et nationales, et requièrent alors des solutions à plusieurs niveaux, à l’instar de la  « prise en charge », à savoir que même dans les écoles publiques du pays, les parents doivent payer la scolarité, sinon leur enfant est chassé de l’école, un comportement normalement caractéristique du secteur privé. En effet, des enseignant·e·s du public n’étant pour certain·e·s pas payé·e·s, les parents paient les salaires directement, ce qu’on appelle pudiquement « payer la motivation des enseignants ».

L’enjeu principal, renforcer le syndicalisme

Quand les sujets sont nationaux, l’intervention des syndicats est clairement nécessaire.

Un des objectifs de l’évaluation était de savoir si le nombre de membres cotisants a augmenté, ce qui est le cas. Il faut arriver à un renforcement des syndicats par le renforcement du paiement régulier des cotisations syndicales. Il existe donc bien un renforcement de l’unité syndicale et un encouragement du syndicalisme à la base, sur le lieu de travail.

Des graines de syndicalisme ayant été semées dans 30 écoles par région, un enjeu est d’élargir cette activité. Chaque animateur·rice doit implanter un cercle d’études dans une école proche de la sienne, pour la laisser autonome après un certain nombre de séances.

Il importe aussi que les cercles d’études se constituent à terme en réseau pour échanger les expériences positives et négatives, et ne restent pas isolés.

Les fiches de réunion de cercles d’études envoyées à l’échelon syndical régional, au·à la responsable syndical·e régional·e. représentent encore un autre enjeu. Si ces fiches montrent des préoccupations communes régionales, le·la responsable syndical·e régional·e doit faire remonter à l’échelon syndical national. Il convient donc d’améliorer la communication ascendante et descendante, et les fiches représentent une aide pratique à la décision, à une perception plus fine des responsables nationaux·ales de ce qui se passe à la base.

Ceci est d’autant plus crucial que la RDC étant un pays est gigantesque, se déplacer y est presque impossible, et pratiquement aucune province n’est accessible par la route. De plus, le niveau de précarité dans les régions est important, et il y a de fréquentes coupures d’électricité, donc l’accès à Internet est très limité. Les échanges d’informations s’avérant presque impossibles par courriel, et aussi par WhatsApp, par manque d’équipement téléphonique adéquat, l’organisation des réunions des cercles d’études est pilotée par téléphone.

« Malgré un contexte difficile, les responsables des syndicats membres de l’IE en RDC montrent un engagement fort et se battent pour faire valoir les intérêts des travailleurs et travailleuses de l’éducation, et pour que les cercles d’études fonctionnent », a fait valoir le Secrétaire général de l’IE David Edwards.