Une nouvelle étude met en lumière le rôle grandissant des intérêts privés dans le secteur de l’enseignement public en Argentine et les menaces qu’une telle évolution fait courir pour l’équité et la qualité de l’éducation.
« La privatisation de l’éducation en Argentine », un rapport de l’Internationale de l’Education (IE) et de la Confederación de Trabajadores de la Educación de la República Argentina(CTERA), affiliée à l’IE, a été présenté aujourd’hui à l’occasion d’un événement public à Buenos Aires.
Ce rapport a été rédigé et publié par des chercheurs/euses locaux/ales et par une équipe de l’Université de Cambridge. Il offre un aperçu des processus qui traduisent la privatisation de l’éducation et de leur impact sur la qualité et l’équité dans le système de l’enseignement public en Argentine.
Absence de transparence et réorientation du financement
Les conclusions du rapport montrent une augmentation des subventions accordées à l’enseignement privé, qui sont passées de 15 % du budget de l’éducation durant la période 2000–2007 à 17,5 % du budget en 2015. L’étude attire également l’attention sur une absence générale de transparence s’agissant de l’allocation de ces subventions: des fonds publics se trouvent ainsi attribués à des établissements privés, sans critères clairs de sélection. Les objectifs de lucre que poursuivent les individus et les organisations en charge des établissements d’enseignement sont rarement pris en considération lorsqu’ils se voient accorder des subventions.
Le rapport relève également une réduction du financement public dans des domaines essentiels pour assurer la qualité de l’éducation, comme la formation des enseignant(e)s, dont le budget a été réduit de près d’un pour cent l’année dernière encore. Le rapport révèle que cette politique est le résultat de l’influence grandissante du secteur privé (sociétés, organisations non-gouvernementales, organisations philanthropiques) au sein des infrastructures gouvernementales et dans l’élaboration des politiques.
La présence croissante des acteurs privés
Ces acteurs non étatiques sont de plus en plus présents dans le développement du matériel pédagogique, les programmes de formation des enseignant(e)s et l’élaboration de tests normalisés. Le professeur Susan Robertson, de l’université de Cambridge, a déclaré que l’étude mettait en lumière les tendances et les acteurs qui font évoluer de secteur, comme la Varkey Foundation ou Teach For America. Ces acteurs, a-t-elle expliqué, ont changé: « Les pionniers du passé ont été remplacés par d’autres, d’un type nouveau, un groupe dont la foi aveugle dans le marché, dans l’esprit d’entreprise et dans la rentabilité inspire désormais les décisions prises par les responsables du développement des politiques de l’éducation ».
La réponse des syndicats
Sonia Alesso, Secrétaire générale de la CTERA, a déclaré que son syndicat était tout à fait conscient de la nécessité de « partager et diffuser les résultats de cette étude dans chaque province, dans chaque municipalité, dans chaque école d’Argentine, afin de renforcer et de promouvoir ce mouvement de réaction globale à la privatisation et à la commercialisation de l’éducation ».
Angelo Gavrielatos, Directeur de l’Initiative Réponse mondiale à la privatisation et la commercialisation de et dans l’éducation au sein de l’Internationale de l’Education, a ajouté: « Les gouvernements ont une responsabilité collective, celle de fournir aux citoyens un enseignement public de qualité. Les gouvernements intelligents examinent les preuves et les prennent en considération pour arrêter leurs décisions. Le présent rapport ne fait que s’ajouter à la masse considérable de preuves qui montrent que l’application des principes du marché dans l’enseignement n’améliore pas les résultats des étudiants. »
Gavrielatos a également regretté l’absence de représentant(e)s du parti au pouvoir lors de la présentation de l’étude, qui a eu lieu à la veille du déjeuner du Congrès national.
Vous pouvez télécharger l’intégralité du rapport ici(en espagnol).