Près de 300 femmes (et quelques hommes) de 100 pays ont assisté à la seconde Conférence mondiale des femmes de la Confédération syndicale internationale (CSI) qui s’est tenue du 19 au 21 novembre à Dakar (Sénégal). Le Président sénégalais, Macky Sall, a reconnu l’importance de cet événement organisé pour la toute première fois dans un pays africain, en indiquant qu’il s’agissait de l’une des conférences majeures organisées dans son pays. La séance d’ouverture a été présidée par Aminata Touré, la seconde femme à occuper le poste de Premier Ministre au Sénégal.
Exceptionnellement, cette conférence des femmes a été intitulée « Assemblée sur la syndicalisation des femmes », en vue de mettre en lumière son importance stratégique au regard de l'objectif plus large de la CSI visant à « renforcer le pouvoir des travailleuses et travailleurs ».
« Cette conférence est dédiée à l'action», a déclaré la Secrétaire générale de la CSI, Sharan Burrow, en soulignant qu’il devient urgent de renforcer le pouvoir des travailleurs/euses, car les syndicats luttent actuellement pour « reconquérir nos démocraties, nos communautés, notre dignité au travail et nos droits en tant que femmes et travailleuses ». Les participant(e)s à cette conférence ont dès lors été invité(e)s à définir les stratégies, les outils et les mécanismes qui permettront aux femmes syndicalistes de devenir le moteur du mouvement syndical aux quatre coins du monde.
Les femmes, un véritable pilier de la lutte syndicale
L'essayiste et militante politique malienne Aminata Traoré s’est fait l’écho de ce sentiment lors de sa présentation, en affirmant que le syndicalisme constitue une forme de lutte.
Elle a exhorté les femmes syndicalistes à devenir les instruments intellectuels de la lutte actuelle, avant de souligner que les syndicats se doivent de relever ce défi, car dans ce contexte d'aggravation des crises, « nous avons non seulement besoin de créativité politique, mais il nous faut également réinventer le travail et repenser l'économie ».
Les participants se sont levés d'un bloc et ont applaudi pour exprimer leur satisfaction après que le premier ministre du Sénégal, Aminata Touré, a annoncé que son gouvernement prévoyait d’accélérer le processus de ratification des Conventions de l'OIT n°189 (sur les travailleuses et travailleurs domestiques) et n°183 (sur la protection de la maternité).
Les femmes portent la moitié du ciel, mais ne représentent que 12 pour cent des dirigeant(e)s syndicaux/ales
L'analyste politique et militante Hakima Abbas a affirmé que les modèles de leadership existants reposent essentiellement sur les caractéristiques considérées comme « propres aux hommes » et « masculines ». Ainsi, lorsqu’une femme cherche à occuper un poste de leader, on considère généralement qu’elle n’est pas une « femme convenable ».
Etant donné que la conférence vise à identifier le meilleur moyen d'accroître le nombre de femmes leaders, Hakima Abbas a suggéré aux participant(e)s de réfléchir au concept de leadership « à plusieurs dirigeantes et dirigeants ». Un tel leadership est « dirigé par les collectivités de militantes et militants, par des coalitions... » Concevoir un leadershipà plusieurs dirigeant(e)s implique, dès lors, de reconnaître les nombreuses façons dont les mouvements sociaux et les groupes d'individus ont pu être guidés par des vagues de protestation, unissant leurs forces pour œuvrer et plaider en faveur du changement.
Grâce à cette conception du leadership, la société peut alors reconnaître qu’en définitive, les femmes occupent depuis bien longtemps un rôle de leader. Par exemple, lors des révolutions en Tunisie et en Égypte, les femmes ont protesté ensemble, comme aux côtés des hommes, et ont ouvert la voie à cet élan de changement qui a permis de balayer la vieille garde politique.
Passer à l’action
Pour que ces aspirations deviennent réalité, la CSI appelle ses affiliés à adhérer à la campagne « Comptez avec nous ! » qui vise à accroître le nombre de femmes à la tête des syndicats et à intensifier les efforts en faveur de la syndicalisation des femmes. Les objectifs à moyen terme sont les suivants: 100 organisations affiliées à la CSI adhèrent à la campagne d'ici le 3e Congrès de la CSI en 2014; 80 pour cent des membres du Conseil général de la CSI comptent au moins 30 pour cent de femmes dans leurs structures décisionnelles d'ici le 4e Congrès de la CSI, en 2018; 5 pour cent d'augmentation du nombre de femmes parmi les membres de chaque centrale nationale adhérant à la campagne « Comptez avec nous ! » d'ici le Congrès de la CSI en 2018.
Les participant(e)s ont réagi avec enthousiasme à cet appel et ont suggéré certaines actions visant à assurer la pérennité du leadership des femmes, une fois ces pourcentages atteints. Un point fondamental a également été soulevé: il est important de mettre sur pied des mécanismes de soutien et de suivi de l’avancement des femmes à la tête des syndicats, car le chemin vers le leadership peut s'avérer ardu pour les femmes lorsqu'elles sont peu nombreuses.
Les conclusions de la conférence seront présentées lors du 3e Congrès de la CSI qui sera organisé à Berlin, en 2014, où nous espérons que la syndicalisation des femmes et les efforts de l'Assemblée sur la syndicalisation des femmes seront reconnus comme des éléments essentiels au renforcement du pouvoir des travailleurs/euses.
Pour plus d'informations sur l'Assemblée sur la syndicalisation des femmes de la CSI, veuillez cliquer ici.