“La dignité et la liberté intellectuelle transcendent, comme un phoenix, les barreaux et les cellules de la répression et la tyrannie étatique.”
Ces mots d’espoir et de défi se sont échappés de la cellule de prison de Samuel Morales dans une lettre ouverte à ceux qui le soutiennent à travers le monde et dans sa Colombie natale, l’endroit le plus dangereux pour être syndicaliste.
Ancien enseignant dans une école rurale ne comprenant qu’une salle de classe et président régional de la Confédération syndicale colombienne (CUT), Morales a été capturé aux côtés de Raquel Castro, une activiste au sein de l’Association des Enseignants d’Arauca, le 5 août 2004, après une opération militaire au cours de laquelle ils ont été témoins du fait que des soldats gouvernementaux ont tiré et tué trois autres activistes syndicaux.
Morales et Castro ont été reconnus coupables de “rébellion” en novembre 2006, malgré de sérieux doutes quant à la fiabilité des preuves contre eux. Amnesty International a exprimé son inquiétude qu’ils n’aient pas reçu un procès équitable, tout particulièrement car aucun des accusés n’a été assisté d’un avocat ou même ne savait qu’un procès avait lieu. Morales fait appel contre sa con damnation.
Castro et Morales étaient tous les deux des responsables élus de la CUT d’Arauca, une région riche en pétrole au Nord-Est de la Colombie où la population indigène et les paysans ont souffert de violations des droits humains par les groupes paramilitaires de droite et ont été arrachés à leurs terres par les sociétés multinationales pétrolières. Leur seul “crime” a été leur implication dans une campagne démocratique paisible de la CUT visant à protéger l’environnement et à sauvegarder leur communauté.
Pendant son séjour en prison, Castro a été soumis à de la torture psychologique, subissant par exemple un simulacre d’exécution ou étant jetée pieds et poings liés dans un hélicoptère avec les corps de ses trois collègues assassinés. Les conditions de détention pour les deux prisonniers étaient très dures, la crainte pour leurs vies étant une réalité quotidienne. Néanmoins, tous les deux ont continué à enseigner et à plaider en faveur des droits humains lors qu’ils étaient en prison. De sa prison, Castro écrit également des poèmes.
Morales a été relâché le 28 avril 2007, mais, au moment de l’impression du magazine, Castro demeurait emprisonnée dans l’aile des prisonnières politiques de la prison pour femmes de Bogota. Aucun de ces activistes ne devrait pouvoir se rendre au Congrès mondial de Berlin pour y recevoir le Prix des Droits humains et syndicaux.
Alors que la remise en liberté de Morales est bienvenue, lui et sa famille risquent toujours d’être attaqués par les paramilitaires qui les ont menacés auparavant. L’Internationale de l’Education se joint à Amnesty International pour appeler les autorités colombiennes à assurer la sécurité à la fois des deux enseignants et des membres de leurs familles.
La Colombie possède l’un des pires records concernant les droits humains dans le monde, mais demeure un bénéficiaire majeur de l’argent des contribuables du Royaume-Uni et British Petroleum est impliqué dans les violations. Pour ces raisons, les syndicalistes du R-U ont été en première ligne des campagnes pour défendre leurs soeurs et frères colombiens. Amnesty International estime que 4000 syndicalistes ont été assassinés ou ont “disparus” ces 20 dernières années. La Commission colombienne des droits humains liste 33 enseignant(e)s syndicalistes tués dans ce pays l’an dernier seulement.
En honorant Raquel Castro et Samuel Morales, l’IE honore également les milliers d’autres enseignant(e)s et syndicalistes qui ont payé de leur liberté et même de leur vie leur attachement aux principes syndicaux, à la justice sociale et à une éducation de qualité pour chaque enfant colombien.