La Fédération des syndicats de l'Éducation nationale (FESEN) a interpellé les ministres en charge de l’éducation à se saisir du dossier de la précarité des enseignant·e·s du privé pour que « fin soit mise à leur supplice ».
S’adressant aux ministres des Enseignements primaire et secondaire, de l’Enseignement technique, et de la Formation et de l’Insertion professionnelles, le secrétaire général fédéral de la Fédération des syndicats de l'Éducation nationale (FESEN), Sénon Hounsime a souligné que « la FESEN, qui attache du prix à la qualité de l’enseignement au Togo et donc à l’amélioration des conditions de vie et de travail des enseignant·e·s, tant du public que du privé, sait compter sur l’engagement national et international de l’État togolais en matière d’Éducation pour Tous. »
Le syndicat est prêt à œuvrer aux côtés des autorités de l’État et de l’Union des Fondateurs des Écoles Privées Laïques du Togo pour une amélioration concrète des conditions de travail et de vie des enseignants des écoles privées et partant pour une amélioration de la qualité de l’enseignement au Togo.
Hounsime a expliqué que dans l’esprit d’une « École nouvelle » que la politique togolaise s’est définie, « des objectifs nobles » ont été assignés à cette école », entre autres :
- Une école démocratique donc accessible à tous ;
- Une école plus rentable qui passe par la qualification professionnelle du personnel enseignant ; et
- Une école qui contribue au développement.
Vis-à-vis de ces objectifs, l’École nouvelle reconnaît l’existence des écoles privées. Se basant sur cette reconnaissance, les autorités de l’éducation ont entériné l’existence des écoles privées, , qu’elles ont classées en privées confessionnelles et privées laïques. Et des conditions ont été fixées pour leur ouverture et leur fonctionnement.
Le dirigeant de la FESEN a néanmoins fait remarquer que, « depuis quelques années, sous prétexte du qualificatif ‘privé’, les établissements en question poussent comme des champignons, avec un but primordial, celui d’engranger des bénéfices énormes. »
Une privatisation non réglementée a un impact négatif sur la qualité de l’éducation
Hounsime a également condamné le fait que, dans le secteur de l’enseignement au Togo, tout le monde peut créer une école à tout endroit et recruter du personnel comme bon lui semble, sans recourir véritablement aux textes qui réglementent l’emploi et le travail :
« Aujourd’hui, le profil des fondateurs d’écoles varie, des hommes d’affaires, des transitaires, des tailleurs aux groupements de jeunes diplômés en passant par des notaires et avocats, etc. Bref, on note dans cet ensemble des femmes et hommes qui ont plus envie d’utiliser le secteur de l’Éducation pour gagner de l’argent que d’aider le citoyen togolais, fût-il enseignant ou apprenant, à s’épanouir comme l’appelle de tous ses vœux l’École nouvelle. »
Il a insisté sur le fait les salaires des enseignant·e·s sont fixés à la tête du client, les contrats de travail « inexistants, insolites ou foulés au pied à tout moment sans grand bruit ». Cette stratégie non seulement ne permet pas à l’employé·e de bénéficier d’une quelconque ancienneté, mais elle met aussi la pression sur cet·te employé·e qui doit savoir qu’à la moindre revendication, il·elle n’aura plus son poste à la prochaine rentrée.
Selon lui, conscient·e·s de cette situation intenable qu’il·elle·s ont créée, les fondateur·trice·s d’écoles privées vont faire développer une pratique de spoliation des élèves qui consiste à leur imposer des cours de répétition forcés de plusieurs séances par semaine et des cours de vacances interminables.
Soulignant que la pratique prend l’allure de « chantage des enseignants en situation de survie », il fait en outre noter que les séances imposées aux enfants n’ont pas toujours l’objectif de renforcer la capacité des élèves en difficulté, mais visent à transmettre les solutions des prochaines évaluations telles que l’enseignant·e envisage de les organiser.
Hounsime a continué en déplorant que lesquelles l’État semble être indifférent à ces conditions précaires qui se sont aggravées avec la crise sanitaire née de la pandémie de COVID-19 ayant conduit à la suspension des activités scolaires : « Sous le prétexte de non-activité, les enseignants des écoles privées ont été abandonnés par les promoteurs d’écoles et par le gouvernement qui n’a apporté aucune solution concrète à leurs cris de détresse. Certains parmi eux, pères de famille, ont été privés pendant trois mois de leurs salaires déjà maigres, plongeant des familles entières dans la disette et dans la désolation totale. »
Il a aussi insisté sur le fait que la précarité dans laquelle ces enseignants sont maintenus « déteint sérieusement sur la qualité de l’enseignement à laquelle tous les Togolais ont droit. Elle explique en partie la dépravation des mœurs auxquelles les établissements scolaires sont confrontés. »
L’État doit réguler le secteur de l’éducation, vital pour le développement du Togo
Il a conclu : « Il est temps que l’État reprenne ses prérogatives de régulateur dans ce secteur vital pour le développement de la nation. Il est donc temps pour l’État de redorer le blason de cette école qui forme nos enfants. »
Demandes claires de la FESEN
C’est pourquoi la FESEN demande aux autorités publiques nationales que :
- L’arrêté du 10 février 1983 et les textes qui en découlent réglementant l’enseignement privé laïc soient appliqués correctement et sans complaisance, tant dans l’implantation et les infrastructures de l’établissement, le personnel enseignant que dans le profil des fondateur·trice·s d’écoles privées.
- Le niveau des enseignants requis par la législation scolaire puisse être effectivement respecté. L’État doit en effet veiller à créer un vivier d’enseignant·e·s qualifié·e·s.
- L’État contrôle les avenants entre employeurs et employé·e·s avant l’agrément et son renouvellement.
- À partir des textes existants, les établissements qui ne remplissent pas le minimum des conditions topographiques, sanitaires et scolaires soient mis en demeure de se mettre aux normes.
- L’État professionnalise les enseignant·e·s des écoles privées par des formations initiales et continues, comme l’État lui-même le préconise dans la Réforme. Il s’agit d’assurer une formation permanente des enseignant·e·s pour rehausser leur niveau et garantir la qualité de l’enseignement au Togo.
- Une convention interprofessionnelle sectorielle soit élaborée, à partir de l’application de la convention collective interprofessionnelle du Togo. Dans cette convention sectorielle, les salaires payés aux enseignant·e·s diplômé·e·s des universités du Togo doivent correspondre à une grille d’avancement bien définie et établie.