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Photo: Jürgen Klute / Flickr
Photo: Jürgen Klute / Flickr

« Gouvernements, honorez vos promesses: faites en sorte que l’éducation au changement climatique soit universelle dès maintenant! », par David Edwards.

Publié 24 septembre 2019 Mis à jour 27 septembre 2019
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L’adoption en 2015 d’un programme progressiste en vue d’un monde meilleur, les Objectifs de développement durable (ODD), par les États membres des Nations Unies fut un moment historique. Un élément important résidait au cœur des ODD: la reconnaissance (bien que tardive) que le développement social et économique ne pouvait durer si l’on ne tenait pas compte de son impact sur l’environnement. En d’autres termes, il fallait considérer les personnes et la planète sur un pied d’égalité.

Pourtant, quatre ans plus tard, qu’ont fait les gouvernements pour éviter la catastrophe due aux changements climatiques causés par l’Homme, qui touchera de manière imminente les personnes et la planète? Très peu de choses. Les catastrophes naturelles induites par le climat causent déjà des dégâts sans précédent, mais nous continuons malgré tout à laisser la température mondiale grimper. Entre-temps, un outil puissant dédié à la lutte contre la crise climatique, l’éducation aux changements climatiques, a été presque entièrement ignoré par nos gouvernements.

Avec l’adoption des ODD, l’ensemble des États membres des Nations Unies se sont engagés à instaurer l’éducation aux changements climatiques pour tou·te·s, en s’appuyant sur les promesses faites par le passé et en les réitérant. Les gouvernements ont donné leur parole pour « améliorer l’éducation... en ce qui concerne l’adaptation aux changements climatiques, l’atténuation de leurs effets et la réduction de leur impact et les systèmes d’alerte rapide» (cible 13.3), « faire en sorte que toutes les personnes, partout dans le monde, aient les informations et connaissances nécessaires au développement durable et à un style de vie en harmonie avec la nature» (cible 12.8) et « faire en sorte que tous les élèves acquièrent les connaissances et compétences nécessaires pour promouvoir le développement durable, notamment... éducation en faveur du développement et de modes de vie durables[dont l’éducation au changement climatique constitue un élément essentiel] » (cible 4.7).

Ce cadre des ODD reconnaît l’importance vitale de la sensibilisation à la crise climatique ainsi que de la diffusion d’informations et de faits à ce sujet si nous voulons nous y attaquer. On s’accorde à dire que tou·te·s les étudiant·e·s doivent acquérir les compétences, les connaissances et les attitudes nécessaires pour lutter contre les changements climatiques. Cette thématique doit dès lors être enseignée dans toutes les matières et à tous les niveaux. Pour ce faire, l’éducation aux changements climatiques doit être intégrée aux politiques d’éducation, aux programmes scolaires, à la formation des enseignant·e·s et auxévaluations de chaque nation. Tous les gouvernements se sont mis d’accord sur ce point, mais qu’en est-il dans la réalité? Quels progrès ont été réalisés?

D’après un rapport récemment publié par l’Internationale de l’Éducation (IE) qui évalue les progrès réalisés dans la concrétisation de l’ODD 4, intitulé Rattrapons le retard, l’éducation aux changements climatiques est loin d’être universelle. Que du contraire, nos systèmes éducatifs ne sont en réalité pas aptes à fournir une éducation de qualité pour le problème le plus important à laquelle l’humanité est confrontée aujourd’hui. Des enseignant·e·s du monde entier déclarent ne pas se sentir suffisamment soutenu·e·s pour enseigner l’éducation aux changements climatiques, et peu d’entre eux·elles ont suivi un programme de formation initiale ou de développement professionnel qui inclut les changements climatiques. Certain·e·s se voient même refuser l’autorisation d’enseigner les sciences du climat en raison du climatoscepticisme des décideur·euse·s et responsables politiques de leur juridiction.

Les étudiant·e·s mobilisent dans les rues pour réclamer une éducation aux changements climatiques. Les systèmes éducatifs doivent rattraper leur retard. Même si nous arrivons à faire de l’éducation aux changements climatiques une réalité d’ici 2030, il sera trop tard pour notre planète. Nous devons agir dès maintenant. Mais que faire? Voici nos trois recommandations:

Les 3 P de l’IE:

  1. Planifier

L’éducation aux changements climatiques ne pousse pas sur les arbres. Si les gouvernements souhaitent réellement instaurer l’éducation aux changements climatiques dans tous les établissements d’enseignement, ils doivent s’assurer que les fonds nécessaires seront affectés pour l’élaboration des programmes, le matériel pédagogique, les ressources humaines et la formation des enseignant·e·s pour l’éducation au changement climatique. En Allemagne, une recherche demandée par un syndicat membre de l’IE et ses alliés a révélé que l’introduction de l’éducation au développement durable dans toutes les écoles du pays coûterait environ 13,7 milliards d’euros, soit une augmentation de 3,6 % des dépenses nationales d’éducation. Afin de faire en sorte que l’éducation aux changements climatiques devienne universelle, les gouvernements doivent planifier la façon dont elle sera mise en œuvre, budgétiser son lancement et soutenir leurs promesses avec les fonds nécessaires.

  1. Prioriser

Si l’éducation aux changements climatiques doit être universalisée, les systèmes éducatifs doivent lui donner la priorité. Jusqu’à présent, les gouvernements ont braqué leur attention sur d’autres aspects de l’ODD 4, et donné la priorité à l’amélioration des résultats d’apprentissage des élèves en numératie et en littératie aux dépens de résultats scolaires plus larges. En outre, la tendance à la privatisation, le fait que les écoles soient gérées comme des entreprises et la vision étroite centrée sur les résultats des tests exacerbent l’importance excessive accordée aux matières dites « principales ». Pourtant, quoi de plus important que l’éducation pour sauver notre planète et l’humanité? Il est indispensable de repenser les systèmes qui font passer l’éducation aux  changements climatiques au second plan et d’offrir aux enseignant·e·s l’autonomie professionnelle dont ils·elles ont besoin pour enseigner le climat.

  1. Prêcher par l’exemple

Les gouvernements doivent veiller à ce que les établissements d’enseignement « joignent le geste à la parole » et deviennent des piliers de l’action climatique. Des politiques doivent être adoptées afin d’encourager les établissements d’enseignement non seulement à enseigner la crise climatique, ses causes profondes et ses solutions, mais aussi à réfléchir à des pratiques durables. Les établissements d’enseignement doivent respecter l’environnement, en réduisant leurs déchets, en recourant aux énergies renouvelables ou encore en recyclant, entre autres. Par ailleurs, il est important que les pratiques pédagogiques de l’éducation aux changements climatiques traduisent les objectifs de transformation inhérents à cette forme d’éducation. Dans ce cadre, les méthodes pédagogiques doivent être axées sur l’action et la coopération et doter les élèves des connaissances, des compétences et des attitudes nécessaires pour devenir des acteur·rice·s du changement pour une société meilleure.

Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.