A l'occasion de la Journée internationale des droits humains, l'Internationale de l'Education (IE) a lancé sa dernière étude sur la décolonisation de l'éducation, soulignant le rôle clé des syndicats dans le démantèlement des héritages coloniaux dans les systèmes d'enseignement public à travers le monde.
L'étude découle des mandats des 8e et 9e Congrès mondiaux de l'IE visant à renforcer les politiques de décolonisation de l'éducation, en réaffirmant que les syndicats sont des acteurs clés dans l'élaboration de politiques publiques d'éducation transformatrices. Le président de l'IE, Mugwena Maluleke, a ouvert l'événement en soulignant les racines systémiques du colonialisme dans l'éducation. Il a décrit les héritages coloniaux comme étant profondément liés au capitalisme, au patriarcat et à l'exploitation, l'éducation servant souvent d'outil pour perpétuer ces injustices. « Le mouvement syndical de l'éducation est, à la base, un mouvement décolonial », a-t-il déclaré, inscrivant la décolonisation de l'éducation dans le cadre d'une lutte plus large pour la justice sociale.
M. Maluleke a souligné que les syndicats sont particulièrement bien placés pour remettre en question les dynamiques de pouvoir coloniales, non seulement au sein des systèmes éducatifs, mais aussi dans l'ensemble de la société. Il a souligné les efforts déployés par les syndicats pour promouvoir des politiques antiracistes, la formation des enseignant·e·s à une pédagogie culturellement pertinente et l'inclusion de diverses perspectives culturelles et historiques dans les programmes d'études.
Gabriela Bonilla, chercheuse principale, a ensuite présenté l'éducation comme un champ de bataille pour la justice et l'équité. Elle a expliqué que les systèmes éducatifs sont profondément influencés par les structures coloniales, qu'il s'agisse des programmes qui marginalisent les connaissances des autochtones et des Noir·e·s ou de la formation des enseignant·e·s qui perpétue les méthodes eurocentriques. Mme Bonilla a souligné que les syndicats sont particulièrement bien placés pour remédier à ces injustices, non seulement en plaidant en faveur de politiques éducatives décoloniales, mais aussi en remodelant les systèmes mêmes qui perpétuent l'inégalité. Elle a souligné l'importance de cette initiative : « Cette étude nous aide à construire une compréhension commune et renforce notre pouvoir collectif de défendre l’enseignement public et de garantir la justice pour l’ensemble des apprenants et apprenantes et des enseignants et enseignants ».
L'étude explore la manière dont les syndicats de 12 pays des régions de l'IE s'attaquent aux structures coloniales ancrées dans les programmes, la formation des enseignant·e·s et la gouvernance. Leur travail couvre un éventail d'actions, allant de la promotion de programmes culturellement inclusifs et du soutien à l'éducation dans la langue maternelle à la lutte contre le racisme systémique et au plaidoyer en faveur d'un meilleur financement public. L'étude fournit également des idées et des stratégies concrètes pour créer des systèmes éducatifs inclusifs et équitables qui remettent en question les dynamiques de pouvoir hiérarchique et promeuvent la justice épistémique.
Un effort collectif de décolonisation
L'événement comprenait deux sessions au cours desquelles des dirigeant·e·s syndicaux·ales ont partagé leurs expériences et leurs stratégies. Mark Potter, du NZEI (Nouvelle-Zélande), a décrit le chemin parcouru par son syndicat pour faire face à sa propre histoire coloniale. Il a mis en exergue à quel point la pensée coloniale peut façonner la gouvernance et la politique de l'éducation et a souligné l'importance d'intégrer les systèmes de connaissances autochtones dans les structures syndicales et les programmes d'études.
Osman Isci, d'Eğitim-Sen (Turquie), a mis en lumière les défis liés à la défense de l'éducation multilingue dans un environnement politiquement répressif. Malgré les obstacles, il a souligné l'importance de préserver la diversité linguistique en déclarant : « Je veux rêver dans ma langue maternelle ».
Au Brésil, Ieda Leal, de la CNTE, a souligné la nécessité de « décoloniser les esprits et les cœurs » et a appelé les syndicats à s'unir contre le racisme et le sexisme dans les systèmes patriarcaux. Elle a insisté sur le fait que les communautés autochtones doivent jouer un rôle central dans la conception des programmes et l'élaboration des politiques éducatives.
De l'Argentine au Sénégal, le webinaire a mis en lumière diverses approches, telles que la défense de l'éducation multilingue, l'autonomisation des communautés autochtones et la promotion de politiques antiracistes au sein des syndicats et des systèmes éducatifs.
La feuille de route présentée avec l'étude invite les syndicats du monde entier à valider et à développer ses propositions, garantissant ainsi l'appropriation collective de l'agenda de la décolonisation. Dans le cadre de la campagne mondiale de l'IE La force du public : ensemble on fait école !, il s'agit d'une étape essentielle pour garantir un enseignement public de qualité, inclusive et équitable pour tou·te·s.
Vous pouvez accéder ici à l'étude complète : « Les syndicats ouvrent la voie en matière de décolonisation de l'éducation » (2024), rédigée par Gabriela Bonilla.