Les dirigeant·e·s africain·e·s de l’éducation ont lancé un appel à la paix, au renforcement des investissements pour une éducation de qualité et à l’élévation de la profession enseignante à travers l’Afrique. Ensemble, à l’occasion de la dernière réunion du Comité régional de l’Internationale de l’Éducation pour l’Afrique (CRAIE), ils ont reconnu la nécessité d'accroitre l’implication syndicale des jeunes éducateur·trice·s.
Un appel à l’action
Cet événement s’est tenu du 11 au 13 novembre 2024 à Accra, au Ghana. La présidente du CRAIE Marima Chipkaou y a souligné, dans son discours d’ouverture, les défis permanents que doivent relever maints pays d’Afrique, citant la guerre, les conflits et les violations des droits syndicaux et humains. Elle a exhorté l'Union africaine à mettre en œuvre la nouvelle Stratégie d'éducation continentale pour l'Afrique (CESA) 2026-2035 et a enjoint les organisations africaines membres de l'Internationale de l'Éducation (IE) à soutenir l'initiative « La force du public : ensemble on fait école ! » de l’IE. Mme Chipkaou a également attiré l'attention sur l’importance que revêt la lutte contre la violence fondée sur le genre en milieu scolaire (VGMS) et la promotion d’une éducation de qualité, équitable et inclusive pour tou·te·s.
Le rôle des éducateur·trice·s dans la promotion de la paix
M. Mugwena Maluleke, Président de l’IE, s’est adressé au CRAIE : « Nous sommes entrés dans une ère qui voit s’enhardir l'énergie d’extrême droite. Il nous faut aussi demander la paix dans le monde. Nous devons pousser les gouvernements à financer l’éducation, plutôt que la guerre ! ». En outre, M. Maluleke a souligné la nécessité d’appliquer les recommandations du Groupe de haut niveau des Nations Unies sur la profession enseignante, et réitéré le rôle qu’ont à jouer les éducateur·trice·s pour défendre les droits des membres et l'éducation pour tous les enfants, en Afrique et au-delà.
Présentant le plan opérationnel provisoire 2025 de l’IE en Afrique, Dennis Sinyolo, directeur de l’IEA, a précisé : « L’Internationale de l’Éducation a pour vision d’être la voix des syndicats de l’éducation en tant que force mondiale œuvrant à une éducation de qualité. La vision de l'Internationale de l’Éducation Région Afrique doit concrétiser l’ambition de devenir une région de l'IE efficace, dynamique et réactive, unie pour le droit à une éducation inclusive de qualité et les droits des éducateurs et éducatrices. Et notre mission est de rassembler et mobiliser les enseignants et enseignantes et les personnels de soutien à l’éducation en Afrique afin de lutter pour les droits professionnels et éducatifs. »
Délégations africaines au Congrès mondial de l’IE
En dépit de nombreux obstacles, la participation des organisations africaines membres au 10e Congrès mondial de l'IE a été remarquable. Le congrès a eu lieu dans la capitale argentine de Buenos Aires, du 29 juillet au 2 août 2024.
La secrétaire générale adjointe de l'IE, Haldis Holst, a souligné l'importance de la voix des femmes africaines dans la représentation mondiale. Elle a noté que les femmes formaient 36 % des délégué·e·s africain·e·s, leurs interventions correspondant à 28,6 % des contributions africaines. Elle a insisté sur des constats extraits du récent Rapport mondial de suivi sur l’éducation : il apparaît que nous sommes encore loin de l'ODD 4, un challenge encore plus difficile à relever en Afrique subsaharienne, et qu’en matière de direction d'établissement scolaire, déterminer clairement le rôle d'un·e chef·fe d’établissement relève du défi.
Lever les freins à la participation syndicale des jeunes éducateur·trice·s
Lors de cette réunion, une étude a également été lancée sur les « Obstacles contre l'accession des jeunes éducateurs et éducatrices aux postes de responsabilité et leur participation aux activités des syndicats de l’éducation en Afrique ». Cette étude, à laquelle ont participé 23 pays, porte un éclairage sur les obstacles structurels, socio-économiques et culturels qui empêchent les jeunes éducateur·trice·s de s'investir pleinement dans les activités syndicales et de jouer un rôle de dirigeant·e. La promotion du dialogue intergénérationnel, l'autonomisation financière, l'amélioration des compétences et l'intégration de la technologie sont autant de recommandations visant à combler le fossé générationnel et à soutenir ce jeune public.
Le manque d’enseignant·e·s qualifié·e·s
Chargé de projet principal au sein de l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour l’Éducation 2030 (International Task Force on Teachers for Education 2030 ou TTF), Davide Ruscelli a abordé la question des qualifications du corps enseignant, remarquant la diversité des « contrats d’enseignant·e·s » dans la région. Il a énoncé les six impératifs découlant des recommandations de l'ONU sur la profession enseignante : la dignité ; l'humanité ; l'équité, la diversité et l'inclusion ; la qualité ; l'innovation et le leadership ; et la durabilité dans la profession enseignante. M. Ruscelli a également souligné la nécessité de répondre à la demande croissante de personnel enseignant, chiffrant ce besoin impérieux à 444 millions d'enseignant·e·s dans les niveaux primaire et secondaire à l’horizon 2030, c’est-à-dire 15 millions de plus pour la seule Afrique subsaharienne (Rapport mondial UNESCO/TTF sur les enseignants).
Vers l'équité entre les genres
Présentant le rapport sur la situation de l’égalité des genres en Afrique, la coordinatrice de l’IEA Anaïs Dayamba a réaffirmé que l’équité de genre était indispensable pour atteindre une société pacifique et au développement durable. Elle a mentionné des avancées en matière de sensibilisation, un intérêt des jeunes femmes pour le syndicalisme et une augmentation des femmes élues à la tête des syndicats.
Résolutions du CRAIE
La réunion du CRAIE s'est conclue par l'adoption de trois résolutions : un appel à la paix dans le monde, l'élévation de la profession enseignante en Afrique et une demande au gouvernement angolais de mettre un terme à toute ingérence dans les activités du Syndicat national des enseignant·e·s (SINPROF).
Dans son allocution de clôture, Mme Chipkaou a affirmé « la volonté du Comité de voir la région aller de l'avant. C'est satisfaisant ! Je vois qu'ensemble, nous progressons. J'aimerais que cet enthousiasme perdure à travers les différentes zones de la région africaine, à travers l'ensemble de nos pays. Nous verrons que chaque petit progrès en entraînera un grand. Il est donc primordial de porter nos réalisations régionales au niveau national. »