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Vinod Seegum, négociateur et ancien président du Syndicat des enseignant∙e∙s du Gouvernement (Government Teachers' Union-GTU), partage sa vision de l'évolution de Maurice, de ses défis éducatifs et des perspectives économiques. Il souligne que le GTU les autorités se sont engagés dans un dialogue social accru en vue d’améliorer l’enseignement public et le statut des enseignants.

Reprise économique impressionnante

Sur le plan économique, Maurice a connu une reprise impressionnante post-COVID-19. « L'an dernier, +9% de croissance. Le tourisme est un pilier, mais ce n'est pas le seul », précise Seegum. En 2023, le pays a accueilli 1,3 million de touristes, surpassant sa population de 1,25 million, et prévoit 1,4 million de visiteurs cette année, stimulant ainsi l'emploi et les revenus.

Le gouvernement, disposant d'une manne financière, a augmenté le salaire minimum et les pensions. Il a aussi investi dans l’éducation, ajoute Seegum : « Le primaire, le secondaire et le tertiaire sont gratuits. Désormais, le pré-primaire l'est aussi depuis janvier 2024, allégeant ainsi les charges des parents. »

Rôle central du GTU dans les réformes éducatives

Le GTU, syndicat fondé en 1945, joue un rôle central dans les réformes éducatives. Seegum, témoin et acteur des transformations depuis 40 ans, rappelle que « en 2015, il y a eu un projet de réforme de la scolarité obligatoire continue de 9 ans, jusqu'à 16 ans ». Ce projet a introduit le poste d'enseignant holistique pour des sujets non soumis à examen comme le jardinage et les arts, et le recrutement de 600 enseignantes et enseignants de soutien pour les élèves en difficulté.

« Nous avons insisté pour avoir un deuxième enseignant dans la classe pour aider les enfants qui travaillent lentement », souligne Seegum.

Un dialogue social accru

L'approche du GTU a évolué. « Au début, il y a 25 ans, on s'opposait par des manifestations et des articles. Maintenant, nous dialoguons sans grève ni manifestation », affirme Seegum. Les ministres ont compris l'intérêt d'un dialogue social permanent avec les organisations syndicales pour obtenir une population bien éduquée, un acquis visionnaire depuis l'instauration de l'éducation gratuite au secondaire en 1976.

Lutte pour la parité salariale

Aujourd'hui, les enseignant∙e∙s du primaire doivent obtenir un Bachelor in Education (niveau licence, même niveau que pour les enseignant∙e∙s du secondaire), une lutte de 34 ans qui a abouti et se généralise depuis six ans. « Il y a désormais le même salaire pour enseignantes et enseignants du primaire et du secondaire. C'était la plus grande lutte à Maurice », précise Seegum.

Paradoxe éducatif : le public contre le privé

Maurice est confrontée à un paradoxe éducatif. Malgré la bonne qualité de l'enseignement public, de nombreuses familles aisées préfèrent les écoles privées. « Les flux vers le privé sont en augmentation ces dernières années. Envoyer l'enfant dans le privé est un symbole d'accès à un meilleur niveau social », explique Seegum.

Par ailleurs, les enseignant∙e∙s des écoles privées sont souvent des retraité∙e∙s du secteur public. « Un enseignant à la retraite n'est plus en très bonne forme, mais les parents continuent de leur faire confiance », note Seegum. À noter toutefois que les enfants de ministres vont dans le public.