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Grandes avancées en faveur de l’enseignement et de la recherche à l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle

Publié 14 avril 2023 Mis à jour 20 mars 2024
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La 43e session du Comité permanent du droit d’auteur et des droits connexes (SCCR) de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) s’est terminée sur des victoires importantes pour les enseignant·e·s et les chercheur·euse·s en matière d’adaptation et de choix des ressources pour une éducation et une recherche de qualité. L’Internationale de l’Éducation (IE) a pris part aux débats avec les organisations membres CONADU (Argentine), AUSPS (Fidji) et UASU (Kenya).

Un plan concret pour progresser sur les exceptions et les limitations en matière de droit d’auteur

Le programme de travail sur les exceptions et les limitations proposé par le groupe des pays africains a été adopté. Ce programme prévoit un cadre solide pour faire avancer les discussions sur les exceptions et les limitations du droit d’auteur en faveur des bibliothèques, des services d’archives, des établissements d’enseignement, des centres de recherche et des personnes handicapées. Les dispositions relatives aux limitations et aux exceptions sont capitales parce qu’elles permettent au personnel enseignant, aux chercheur·euse·s, aux bibliothécaires et autres d’utiliser des œuvres protégées par le droit d’auteur sans devoir payer des licences onéreuses aux titulaires du droit d’auteur.

Le programme de travail appelle le comité à se concentrer sur les adaptations des exceptions qui permettent l’enseignement, l’apprentissage et la recherche en utilisant des outils numériques et en ligne. Par exemple, pour permettre aux enseignant·e·s de diffuser un vidéo YouTube en classe ou d’avoir accès à des documents de recherche à partager avec leurs élèves. Il recommande également des mesures concrètes pour faire avancer les débats sur les conséquences des utilisations transfrontalières d’œuvres protégées par le droit d’auteur, par exemple lorsqu’un cours en ligne est suivi par des élèves venant de plusieurs pays ou lorsque des chercheur·euse·s établis dans différents pays collaborent.

Les enseignant·e·s et les chercheur·euse·s qui travaillent au niveau international rencontrent actuellement d’immenses difficultés, comme l’a indiqué un maître de conférences d’une université suédoise, « pour accéder à du matériel de 1956, nous devons nous rendre au laboratoire de la Bibliothèque nationale à Stockholm. C’est une petite cage de verre équipée de trois terminaux d’ordinateur. Vous vous asseyez dans le labo et vous prenez des notes. L’accès coûte 70.000 couronnes suédoises pour la première année et 35.000 couronnes suédoises les années suivantes. Vous n’êtes pas autorisé à introduire ou à sortir des données, tous les travaux doivent être effectués dans la cage. La transparence est totalement inexistante. Si quelqu’un veut vérifier les résultats, il doit acheter la licence, qui coûte très cher. Cela génère beaucoup d’angoisse ! ». Ce témoignage et d’autres qui ont été partagés par l’Association Communia dans la publication intitulée « Personne ne met la recherche en cage » illustrent les obstacles que rencontrent les chercheur·euse·s de l’Union européenne en raison des limitations qu’impose la législation sur le droit d’auteur à la recherche scientifique.

Le programme mentionne également d’autres sujets pertinents pour l’enseignement et la recherche qui pourront être abordés par le comité lors de discussions futures, tels que les exceptions et limitations pour l’exploration de données, les conséquences juridiques de la recommandation de l’UNESCO sur une science ouverte (2021) ou les conséquences transfrontalières découlant des limitations et des exceptions sur la conservation du patrimoine, l’enseignement et la recherche, notamment.

Les dirigeantes de l’hémisphère Sud font entendre la voix des enseignant·e·s et des chercheur·euse·s

Miriam Socolovsky de la CONADU, Grace Nyongesa de l’UASU et Elizabeth Fong de l’AUSPS ont partagé les expériences d’enseignant·e·s utilisant des ressources pédagogiques en classe et rencontrant des problèmes liés au droit d’auteur. Selon l’étude de l’IE intitulée « Est-ce légal ? », les obstacles découlant du droit d’auteur touchent plus fortement le personnel enseignant de l’hémisphère Sud que celui de l’hémisphère Nord. En tant qu’éducateur·trice·s et syndicalistes, les représentant·e·s de l’IE ont apporté une contribution précieuse sur les besoins des enseignant·e·s et des chercheur·euse·s et ont réclamé des réformes du droit d’auteur dans les législations nationales qui garantissent des limitations et des exceptions à des fins d’enseignement et de recherche. L’approbation du programme de travail proposé par le groupe des pays africains constitue un pas important dans la bonne direction.

Se félicitant des résultats de la réunion, Elizabeth Fong a déclaré : « La 43e session du SCCR est considérée comme la meilleure à ce jour. L’important désormais est de garder l’élan jusqu’à la prochaine session afin de parvenir à des changements. L’Association du personnel de l’USP soutient le travail de l’IE dans ce domaine et j’ai été heureuse de pouvoir faire connaître le point de vue de la région du Pacifique lors de cette 43e session du SCCR. Je m’efforce de recentrer la révision de la loi des Fidji de 1999 sur le droit d’auteur en consultation avec le Fiji Teachers Union, la Fijian Teachers Association, la Library Association of Fiji et le représentant des Fidji à l’OMPI, qui encouragera également l’Université des pays du Pacifique Sud à faire de même par l’intermédiaire de leurs gouvernements respectifs ».

Les syndicalistes de l’éducation ont également fait entendre la voix des enseignant·e·s et ont défendu le droit à l’éducation auprès des représentants gouvernementaux du monde entier et des membres de la société civile représentés par la Coalition Access to Knowledge (A2K).

Comme le souligne Miriam Socolovsky de la CONADU, unir les forces de la société civile est essentiel : « Être présente à la 43e session du SCCR m’a permis de prendre contact avec des membres de l’A2K, en particulier avec toutes les organisations latino-américaines, et de commencer à réfléchir à une collaboration entre les syndicats et d’autres organisations. Notre présence a été un atout important pour la coalition A2K parce que nous représentons des millions de personnes travaillant dans le secteur de l’enseignement public. Notre voix est plus audible et les délégués nationaux ne peuvent pas l’ignorer. »

Elizabeth Fong a fait remarquer que « le SCRR a une nouvelle fois montré qu’alors que les gouvernements sont mus par la politique, c’est la société civile qui défend et se bat pour l’égalité d’accès à l’information. C’est notre position en tant que syndicats de l’éducation. »

Prochaine recherche de l’Internationale de l’Éducation

À la session du SCCR, l’Internationale de l’Éducation a présenté les conclusions préliminaires de trois études qui seront publiées plus tard dans l’année. Elles mettent en évidence le point de vue du personnel enseignant sur les effets du droit d’auteur sur l’enseignement et l’apprentissage et les difficultés d’enseigner dans des environnements transfrontaliers, lorsque l’enseignant·e ou les élèves sont situé·e·s dans des pays différents appliquant des législations différentes en matière de droit d’auteur.

Les conclusions préliminaires montrent que :

  • Les enseignant·e·s dépendent de l’accès à du matériel pédagogiques de qualité, notamment des possibilités de rendre ces ressources accessibles aux élèves handicapé·e·s.
  • Les enseignant·e·s utilisent un large éventail de ressources afin de dispenser un enseignement moderne, notamment des œuvres protégées par le droit d’auteur. Ils dépendent dont d’exceptions au droit d’auteur qui soient suffisamment larges et flexibles pour permettre à l’enseignement de suivre les progrès de l’innovation.
  • La plupart des enseignant·e·s utilisent des œuvres protégées par le droit d’auteur.
  • Les enseignant·e·s doivent suivre une formation à la législation sur le droit d’auteur afin de prendre des décisions éclairées concernant l’utilisation du matériel pédagogique.
  • Les difficultés liées au droit d’auteur dans le cadre des activités éducatives transfrontalières requièrent davantage d’attention et des réformes politiques mondiales sous les auspices de l’OMPI. Ces réformes doivent être étayées par des données factuelles provenant des salles de classe.

Les trois études seront lancées en septembre à l’occasion de la Journée internationale pour un accès universel à l’information.