Face au décret du gouvernement péruvien relatif au travail qui permet aux entreprises privées de réglementer l'emploi dans le contexte de la crise du COVID-19, les syndicats ont lancé une campagne pour exiger l'abrogation du décret d'urgence 038-2020 qui autorise une suspension complète du travail, ce qui sape de facto la négociation collective.
Un nouveau décret gouvernemental (décret d'urgence n°038-2020) accorde aux entreprises une certaine flexibilité et leur permet de suspendre les contrats de travail sans droit à rémunération. La mesure, adoptée en marge du dialogue social, est au centre d'une campagne nationale de protestation qui a débuté le 15 avril et à laquelle participe le syndicat péruvien de l'éducation, le Sindicato Único de Trabajadores de la Educación(SUTEP), affilié à l'Internationale de l'Éducation.
La Confederación General de Trabajadores del Perú(CGTP) a publié une déclaration rejetant les mesures contenues dans le décret d'urgence. Dans sa déclaration expresse, elle met également en garde contre « les provocations et pressions exercées par l'organisation patronale de la CONFIEP et le manque de transparence dans les agissements du gouvernement et du ministère du Travail ». Les syndicats craignent que la mesure, initialement destinée à être appliquée par les petites entreprises en difficulté, soit utilisée par les grandes entreprises pour réduire les coûts et porter atteinte aux droits liés au travail.
Selon le secrétaire général de la CGTP, Gerónimo López, « certaines grandes entreprises ont réalisé de gros bénéfices et sont en mesure de maintenir des emplois et de se conformer aux obligations de travail ». López a regretté que la mesure prise par le gouvernement soit générale et applicable à tous les types d'entreprises, indépendamment de leur situation.
Pour le SUTEP Perú, la décision du gouvernement a été prise sans consultation ni dialogue social et en collusion claire avec l'organisation patronale. Le syndicat regrette que « tout semble indiquer qu’il s’agit d’un accord à huis clos entre le secteur des entreprises et le gouvernement ». Le SUTEP a rejoint la première action de protestation sur les réseaux sociaux lancée le 15 avril.
Au Pérou, la majorité des travailleur·euse·s ne connaissent pas la stabilité de l'emploi. La crise du COVID-19 a révélé des licenciements, des suppressions des droits et l'abandon des travailleur·euse·s les plus vulnérables. Les rares travailleur·euse·s, 7 sur 10, qui bénéficiaient d'une certaine sécurité d'emploi (avec un contrat temporaire renouvelable) seront touchés par le licenciement massif en raison de la suspension complète du travail.