La pandémie du COVID-19 continue de se propager à une vitesse alarmante, provoquant de nombreux cas d’infection et de décès à travers le monde. Le virus a également eu un impact dévastateur sur l’éducation. D'après les données communiquées par l’UNESCO ce 23 mars 2020, le nombre de jeunes touchés par les fermetures d’écoles et d'universités dans 138 pays frôlait les 1,4 milliard, soit 80,2 % de l'ensemble des élèves et étudiant·e·s scolarisé·e·s. La pandémie a également touché des millions d’enseignant·e·s et de membres des personnels de soutien à l’éducation.
Compte tenu de cette évolution sans précèdent, il est désormais clair que la crise du COVID-19 affecte également le monde de l’éducation. Les gouvernements du monde entier doivent adopter des mesures rapides, cohérentes et appropriées pour maîtriser la pandémie et minimiser ses effets sur la santé, sur les moyens de subsistance des sociétés ainsi que sur le droit des enfants, des jeunes et des adultes à une éducation de qualité. Dans le secteur de l'éducation, des mesures efficaces face au COVID-19 doivent tenir compte de l’intérêt des élèves, des enseignant·e·s et des personnels de soutien à l’éducation. Il est aussi essentiel d'impliquer les syndicats de l’éducation dans la conception des mesures de confinement et de reprise.
Les recommandations et les principes suivants devraient guider les syndicats de l'éducation, les gouvernements et leurs partenaires lors de l’élaboration d’une réponse au COVID-19.
Principes de base et recommandations
- Préserver la santé, la sécurité et le bien-être des élèves, des enseignant·e·s et des personnels de soutien à l’éducation doit être la priorité numéro un. Des mesures spécifiques doivent être prises pour protéger les éducateur·rice·s qui continuent d'enseigner et s’occupent des enfants du personnel soignant et des autres travailleur·euse·s fournissant des services essentiels. Ces mesures doivent inclure la fourniture d’eau potable et d'équipements sanitaires, la mise en place d’environnements d'enseignement et d'apprentissage sécurisés et sains, ainsi que la mise à disposition d’équipements de protection individuelle, notamment de masques pour se protéger le visage.
- Une approche prenant en compte l'école ou l'établissement d’enseignement, la communauté et le gouvernement dans leur globalité représente le moyen le plus efficace d’enrayer la propagation du virus et d’informer le public. Les communautés scolaire et éducative doivent bénéficier d’un enseignement adéquat, d’informations détaillées et d’instructions précises concernant les mesures préventives. Les syndicats de l’éducation jouent également un rôle important : ils soutiennent et informent leurs membres, qui doivent recevoir des mises à jour régulières.
- Les fermetures d'écoles prolongées entravent considérablement l’éducation de millions d’élèves. Aussi faut-il mettre en place des mesures efficaces afin de minimiser l’impact des fermetures sur l’offre de services d'éducation, notamment des programmes d’éducation à distance, des plateformes d’apprentissage virtuel ou en ligne, des programmes éducatifs télévisés ou diffusés à la radio, ou toute autre initiative similaire.
- Les gouvernements doivent œuvrer de concert avec les éducateur·rice·s et les syndicats de l’éducation pour trouver des alternatives permettant la poursuite de l’enseignement en dépit de la fermeture temporaire des écoles. De telles alternatives ne peuvent être conçues sans l’expertise et l’expérience des éducateur·rice·s. L'avis des enseignant·e·s doit également être pris en compte dans le choix des pratiques pédagogiques ainsi que des outils et des plateformes numériques à employer pendant la fermeture des écoles.
- Certes les TIC et les technologies numériques apportent une solution temporaire dans cette situation de crise, mais elles présentent aussi de nombreux risques. Les gouvernements doivent prendre toutes les mesures nécessaires afin de protéger les données et les informations personnelles des élèves et des éducateur·rice·s, et d’écarter ou minimiser les risques liés à l’utilisation de la technologie, et notamment le cyber-harcèlement.
- Si la technologie peut faciliter l’apprentissage à distance à court terme, elle doit être considérée comme une solution provisoire qui ne remplacera jamais l’apprentissage et l’enseignement dans les salles de classe. Cette forme d’apprentissage ne pourra jamais se substituer au face à face pédagogique entre les enseignant·e·s et leurs élèves et aux interactions entre les élèves, qui sont au cœur de la vie scolaire.
- Les élèves les plus vulnérables pâtissent davantage des conséquences des fermetures d’écoles. En effet, ils sont nombreux à compter sur les repas chauds fournis par l’école et ne disposent pas nécessairement d’outils en ligne destinés à l’apprentissage à distance. Il est également possible que de nombreux parents ne soient pas en mesure, pour diverses raisons, de favoriser l’apprentissage à domicile de leurs enfants. Les fermetures d’écoles accroissent la pression sur les familles en difficulté au sein desquelles certains parents auraient perdu leurs revenus ou leurs emplois à cause de la pandémie et de son impact sur l’économie. Par conséquent, les gouvernements doivent rapidement mettre en place des mesures concrètes pour faire face à la crise et s'assurer que les élèves les plus vulnérables ne soient pas laissés pour compte.
- Les gouvernements doivent offrir des opportunités de développement professionnel, d’apprentissage et du soutien à tou·te·s les enseignant·e·s qui ne disposent pas des compétences nécessaires pour dispenser une éducation à distance et/ou pour utiliser les outils virtuels, les médias et les autres outils numériques afin d’aider leurs élèves durant la fermeture des écoles. Les enseignant·e·s des zones rurales, reculées ou marginalisées doivent faire l’objet d'une attention particulière. Conformément au Protocole de l’IE relatif à l’utilisation des technologies de l’information et de la communication(disponible en anglais uniquement), les stratégies d’apprentissage à distance doivent se baser sur l’avis professionnel des enseignant·e·s sur l’utilisation des plateformes numériques et des programmes informatiques.
- Tout au long de la crise du COVID-19 ainsi qu’au lendemain de la pandémie, les salaires, les conditions et les contrats d’emploi des enseignant·e·s et des personnels de soutien à l’éducation doivent être impérativement protégés à tous les niveaux d’enseignement, indépendamment du type de contrat. Les éducateur·rice·s doivent être rémunéré·e·s comme d’habitude pendant les périodes de fermeture. Les autorités en charge de l’éducation doivent également tenir informé·e·s tou·te·s les employé·e·s du secteur de l’enseignement de manière régulière et en temps utile afin de réduire le degré d’incertitude ainsi que le stress et l'anxiété liés au manque d’informations.
- Dans les pays où les prestataires de services éducatifs privés exercent leur activité parallèlement aux écoles publiques, des mesures doivent être prises afin d’homogénéiser l’attitude à adopter face à la crise du COVID-19 au sein de l’ensemble du système éducatif. Les systèmes éducatifs doivent être protégés par des mesures appropriées de la privatisation et de la commercialisation de l’éducation.
- Les fermetures d’écoles prolongées entraînent souvent une augmentation du taux d’abandon puisque certains élèves ne retournent pas en classe une fois les écoles rouvertes. C’est pourquoi les gouvernements doivent collaborer avec les syndicats de l’éducation afin d’élaborer des stratégies pour prévenir cette éventuelle conséquence des fermetures à grande échelle. Compte tenu de l'importante pénurie d'enseignant·e·s, les gouvernements doivent également définir des stratégies pour prévenir les conséquences de la fermeture des établissements de formation des enseignant·e·s et d’autres établissements d'enseignement supérieur.
- Le COVID-19 peut provoquer des traumatismes dévastateurs chez les élèves et les éducateur·rice·s qui pourraient avoir perdu un être cher ou un·e collègue. Les gouvernements doivent par conséquent s'assurer que tou·te·s les élèves, les enseignant·e·s et les membres des personnels de soutien à l’éducation touché·e·s bénéficient d’un soutien psychologique et social, y compris de services de conseil afin de préserver leur bien-être et leur santé mentale.