Une délégation internationale s’est alliée au syndicat de l’éducationACT pour exprimer sa solidarité envers les syndicalistes enseignant·e·s profilé·e·s et harcelé·e·s par le gouvernement qui viole les droits humains.
Les enseignant·e·s philippin·e·s se sont rallié·e·s sous le slogan #HandsOffOurTeachers en réponse au harcèlement et au profilage dont ils·elles sont victimes depuis l’an dernier. Le 21 février, à Manille, les dirigeant·e·s des syndicats nationaux et locaux ainsi que les dirigeant·e·s de l’Internationale de l'Education (IE) se sont rencontré·e·s à l'occasion du Forum pour la défense des droits des enseignant·e·s aux Philippines. L’ Alliance of Concerned Teachers(ACT), un affilié philippin de l’IE, a organisé cet événement pour protester contre les 34 cas de profilage et de harcèlement de syndicalistes enseignant·e·s dans 10 régions du pays par la police.
Lors du forum, Anand Singh, coordinateur régional de l'IE pour l’Asie et le Pacifique, a souligné l'importance de la solidarité internationale pour la défense des droits humains et syndicaux. Il a condamné « le profilage, la surveillance et le harcèlement continu dont sont victimes les syndicalistes enseignants aux Philippines », et a expliqué comment la région se préparait à soutenir ses membres dans le pays.
Des syndicalistes du monde entier, y compris des affiliés de l’IE en Corée du Sud, au Japon, en Allemagne, aux Etats-Unis, en Australie et au Canada, ont exprimé leur solidarité envers l’ACT. Outre les actions de solidarité et l'envoi de lettres au gouvernement, l’ACT a reçu un soutien directement de la part de l’IE. Le Secrétaire général David Edwards a été invité à intervenir lors de l’événement #HandsOffOurTeachers. « Certains nous diabolisent, nous, les enseignants, parce qu’ils savent à quel point nous avons de l’influence », a-t-il déclaré. « Nous condamnons et nous dénonçons l’oppression et la surveillance de nos enseignants. »
Harcèlement continu
La fuite d'un protocole de profilage de la police du district de Manille a révélé que la police avait reçu l’ordre de « dresser la liste » de tou·te·s les éducateur·rice·s membres de l’ACT. Depuis que ce document a été divulgué et rendu public, des syndicalistes enseignant·e·s d’au moins 10 régions ont signalé que des dirigeant·e·s et membres de l’ACT continuaient à être surveillé·e·s en permanence et étaient victimes d'un harcèlement poussé.
Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 21 février, l’ancienne Secrétaire générale de l’ACT, France Castro, a expliqué comment elle, ainsi que 17 autres collègues, avaient été détenus sur la base de fausses allégations en novembre dernier.Le groupe a été arrêté alors qu’il visitait des écoles autochtones Lumad lors d’une mission humanitaire de solidarité dans la municipalité de Davao del Norte.Ces écoles ont été fermées de force par les militaires, poussant plus de 346.000 personnes à s'exiler.
Le Secrétaire général de l’ACT, Raymond Basilio, a dénoncé publiquement le harcèlement continu que subissent les membres du syndicat. Une pétition à l’intention de la Cour d'appel est en instance. Elle contient des exemples de harcèlement grave, comme ce qu’a subi un enseignant d’une école publique de la ville d’Escalante dont la salle de classe a été saccagée.
Basilio a lui-même fait l’objet de harcèlement: il a reçu des menaces de mort lors d’une conférence de presse de l’ACT en janvier.
Soutien de l’ACT
L’ACT s’est attelée à syndicaliser les éducateur·rice·s aux Philippines en offrant aux enseignant·e·s une plateforme afin qu’ils·elles puissent négocier des conventions collectives. Au parlement, les dirigeants syndicaux France Castro et Antonio Tinio ont encouragé des projets de loi visant à améliorer les conditions des travailleur·euse·s (par exemple, contre la contractualisation des enseignant·e·s, en faveur d’un enseignement supérieur gratuit, du droit à l'éducation pour les étudiant·e·s en situation de handicap et d’une extension du congé de maternité de 60 à 105 jours dans le secteur de l'éducation). Castro et Tinio se sont opposés publiquement aux coupes budgétaires dans les domaines de l’éducation, des soins de santé et du logement. Le budget 2019 proposé pour l’éducation a été réduit de 860 millions d’euros.
Opposition
Les membres de l’ACT qui siègent au parlement se sont aussi opposé·e·s à des mesures prises par le gouvernement de Duterte, notamment:
- Abaisser l’âge minimum pour la responsabilité pénale des enfants (passant de 15 à 12 ans);
- Cibler les enfants pour leur faire suivre un entraînement militaire dès l’âge de 16 ans;
- Cibler les mineurs dans le cadre de la lutte contre la drogue qui a entraîné plus de 10.000 exécutions extrajudiciaires et détentions illégales;
- Prolonger, pour la troisième fois, la loi martiale à Mindanao; et
- Rétablir la peine de mort.
A l’occasion de la visite de solidarité de l’IE aux Philippines, l’ACT a publié une déclaration (en anglais) que vous pouvez consulter en cliquant ici.