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Le nouvel outil de mesure de la performance en classe de la Banque mondiale est recalé

Publié 2 février 2019 Mis à jour 7 février 2019
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Le personnel de l’éducation fait part de son inquiétude en ce qui concerne un nouvel outil d’observation de la salle de classe, élaboré par la Banque mondiale et qui améliorerait les pratiques pédagogiques.

Teach,« un nouvel outil d’observation de la salle de classe aisément disponible », comme l’annonce la Banque mondiale, a été accueilli avec scepticisme par les éducateur·trice·s lors de son lancementà Washington hier. L’Internationale de l’Education (IE), le syndicat mondial de plus de 32 millions d’enseignant·e·s, d’éducateur·rice·s et de personnel de soutien, a mis en doute la légitimité et l’utilité de cet outil.

Il rate sa cible

Selon la Banque mondiale, Teach est un remède efficace à la « crise de l’enseignement » qui sous-tend la « crise mondiale de l’apprentissage ». Teach a pour but d’améliorer les pratiques pédagogiques en évaluant le travail des enseignant·e·s dans les classes des pays à revenu faible et intermédiaire.

L’IE souligne toutefois les multiples problèmes que pose cet outil. Tout d’abord et surtout, les enseignant·e·s n’ont pas été impliqué·e·s dans son élaboration, ce qui démontre que la Banque continue de mettre les syndicats de l'éducation sur la touche et d’ignorer l’appel contenu dans la déclaration d’Incheon en faveur de la pleine participation des enseignant·e·s à l’élaboration de la politique éducative.

Parmi les autres critiques figurent l’approche « taille unique » de l’outil d’évaluation de la qualité de l’enseignement, qui ne tient aucun compte des particularités contextuelles, le caractère général de l’outil en tant que mécanisme potentiel de surveillance plutôt qu’intrant formatif et constructif pour le développement professionnel des compétences et des qualifications du personnel enseignant, la structure simpliste de l’outil qui simplifie à l’excès les nombreuses facettes d’une éducation de qualité et la légitimité douteuse de la Banque mondiale en tant qu’institution financière pour définir une pédagogie de qualité et influencer les méthodes pédagogiques.

IE: Investir dans les enseignant· e· s et leurs évaluateur· rice· s

David Edwards, le Secrétaire général de l’IE, a souligné que, tout en reconnaissant à juste titre que les enseignant·e·s sont essentiel·le·s à une éducation de qualité, la Banque adopte la mauvaise approche pour les soutenir. Il a insisté sur le fait que « pour améliorer la qualité des enseignants, la Banque devrait plutôt concentrer ses efforts sur l’augmentation de l’attrait de la profession enseignante en promouvant de meilleures conditions de travail et d’emploi, une formation initiale de qualité, une formation professionnelle continue et l’autonomie professionnelle du corps enseignant ».

Il a ajouté que les évaluations des enseignant·e·s devraient toujours être élaborées au niveau local, en collaboration avec la profession et être réalisées par des professionnel·le·s. « Les évaluateurs devraient savoir comment fournir des observations qualitatives aux enseignants de sorte que l’évaluation soit formative et serve directement à améliorer les pratiques pédagogiques », a-t-il souligné. Au contraire, les observateur·rice·s qui utilisent le nouvel outil de la Banque n’ont pas d’expérience en tant qu’enseignant·e·s et suivent une formation de quatre jours seulement.

Les éducateur· rice· s font entendre leur voix lors du lancement de l’outil

De manière scandaleuse, mais peut-être sans surprise, l’outil d’observation Teach a été lancé lors d’un événement organisé par la Banque mondiale, au cours duquel les économistes ont parlé entre eux·elles de la façon d’améliorer l’enseignement, en l’absence de tout·e enseignant·e. Pourtant, alors que le panel partisan a fait l’éloge de cet outil, le modérateur Justin Sandefur, du Centre pour le développement mondial, a cité de manière provocatrice le blog d’Edward, faisant ainsi entendre la voix critique des enseignant·e·s dans la salle.

« Un économiste de la Banque mondiale accepterait-il que son évaluation soit réalisée par un citoyen américain lambda sans formation aucune en économie? », a-t-il demandé.

L’IE et les représentant·e·s des enseignant·e·s dans le monde continuent de s’opposer aux initiatives inutiles de la Banque mondiale en matière de politique éducative, comme Teach, et exigent un siège à la table des discussions lorsqu’une politique concernant les enseignant·e·s est élaborée.

Lisez le blog du Secrétaire général de l'IE critiquant l’outil ici, et ajoutez votre voix à la conversation sur cet outil avec le hashtag #successfulteachers.