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Journée Mondiale des réfugiés : « De l’importance de l’éducation pour les jeunes réfugiés », par Gloria Ihirwe Ntakirutinka

Publié 20 juin 2018 Mis à jour 21 juin 2018
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A l’occasion de la Journée Mondiale des Réfugiés, Gloria Ihirwe Ntakirutinka, jeune réfugiée rwandaise poursuivant des études supérieures au Sénégal, fait part de son expérience et de son combat en faveur de l’accès à l’enseignement supérieur pour les réfugié(e)s.

Pouvez-vous vous présenter brièvement ? Pourquoi avez-vous décidé de militer en  faveur de l’éducation des réfugiés ?

Je me nomme Ihirwe, j'ai 21 ans et je suis étudiante en troisième année de droit public. J’ai  grandi dans une famille qui a trouvé refuge dans un pays d’Afrique de l’Ouest après avoir fui le génocide rwandais. Ce pays – le Togo – fut celui qui me vit grandir. En grandissant je voyais mes parents - surtout ma mère - qui travaillaient très dur pour subvenir à nos besoins. Devenue plus grande, comprenant mon statut de réfugiée et la situation de ma famille qui avait tout perdu, je compris qu’une seule chose pouvait m’aider à atteindre mes objectifs :  l’éducation.

Quel a été votre parcours afin de poursuivre vos études dans l’enseignement supérieur ?

Après l’obtention du baccalauréat, j’étais désemparée car je savais que mes parents ne seraient pas en mesure de payer mes études supérieures qui s’avéraient très chères. Quelle ne fut pas ma joie lorsque je fus sélectionnée, après avoir déposé une candidature à une bourse d’excellence du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés me permettant de poursuivre mes études pour la durée d’une licence au Sénégal. Alors que je suis en train d’effectuer ma dernière année de licence, je continue de rechercher une bourse pour effectuer un master l’année prochaine car la bourse dont je bénéficie actuellement ne prend pas en charge les études de second cycle.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez été et êtes confrontée en tant que réfugiée, pour accéder à des études supérieures?

Trouver une bourse n’est pas facile la plupart du temps car dans nos pays d'asile, nous n'avons pas accès aux bourses des nationaux alors que normalement nous devrions être traités comme des nationaux. Par ailleurs, l’accès à des bourses étrangères peut s’avérer difficile à cause de nos titres de voyage qui parfois paralysent l'avancée du dossier. Sans bourse, faute de moyens financiers de nos familles, il est très difficile d’accéder à l’enseignement supérieur.

Que signifie pouvoir accéder à l’enseignement supérieur pour un(e) jeune réfugié(e) ?

Parfois, les réfugiés sont victimes de xénophobie car ils sont perçus comme des personnes incapables qui vivent aux crochets de la société. Or, à travers l’accès à l’éducation, c’est précisément notre autonomie, notamment financière, que nous recherchons car nous voulons sortir nos familles de la misère et être de vraies aides pour nos parents qui se sont donnés corps et âmes pour nous offrir un futur.

Quel message souhaitez-vous délivrer à ce sujet en cette journée mondiale consacrée aux réfugiés ?

Je dirais que la plus belle chose à offrir à toute personne est l’éducation, mais pour des personnes qui ont tout perdu, c’est plus que cela, c’est leur offrir l' opportunité de bâtir leur vie, l'éducation est comme une main forte ou encore une voix rassurante qui te murmure à l'oreille que « tout peut être reconstruit en partant de rien » et cela te pousse à espérer que tout ira pour le mieux.

Le système semble parfois oublier les jeunes refugiés, filles comme garçons, qui luttent pour construire une vie, pour eux-mêmes, pour leurs familles et pour l’ensemble de la communauté. Nous aimerions avoir les mêmes chances d'accès à l’éducation que les nationaux , nous  aimerons aussi une reconnaissance de nos titres de voyage car parfois même avec un bon dossier, on se voit refuser un visa.

« A défaut d’éducation et de qualifications nous permettant de bâtir notre futur, nous sommes condamnés à espérer l’aide de la communauté. Or, si l’on avait eu en temps voulu, l’opportunité d’étudier comme les autres, nous pourrions changer le monde, c’est à dire nous-même, nos familles, la communauté et apporter notre pierre à l’édifice », voilà ce que dirait cette jeunesse laissée sur le bord de la route et qui se retrouvera contre son gré à la charge de tous, si rien ne change.

Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.