Origines
L'histoire des syndicats de l’enseignement débute en 1912 avec la création du Comité international des fédérations nationales d'enseignants des écoles publiques en Belgique. En 1923, la Fédération mondiale des associations de l'éducation (WFEA) est également fondée à San Francisco. Plusieurs autres organisations, comme la Fédération internationale des associations d'instituteurs et le Secrétariat professionnel international de l'enseignement voient le jour en 1926. Toutefois, compte tenu du nombre d'enseignant·e·s dans le monde, aucune de ces organisations ne peut être considérée comme importante. Leurs membres sont alors principalement issus d’Europe et d’Amérique du Nord.
Après la Seconde Guerre mondiale, on assiste à la réorganisation du mouvement syndical mondial, notamment des organisations d'enseignants. Dans l'esprit de la coopération alliée en temps de guerre, la Fédération syndicale mondiale (FSM) est créée en octobre 1945 et compte des membres d’horizons bien plus divers.
Il apparaît toutefois rapidement qu’elle est contrôlée « d'en haut » par le Parti communiste soviétique. Des syndicats libres, indépendants des centres nationaux, quittent alors la FSM, rejoints par d’autres qui n’en n’ont jamais fait partie, et créent en 1949 la Confédération Internationale des syndicats libres (CISL).
Pendant la guerre, en dehors de la Fédération internationale des ouvriers du transport (FIOT), les organisations syndicales sectorielles et les secrétariats professionnels internationaux (SPI, rebaptisés « fédérations syndicales internationales » en 2002), sont peu actifs ou « en hibernation ». La FIOT refuse de renoncer à son autonomie et de se soumettre au contrôle de la FSM. Son indépendance aide également ceux qui souhaitent créer un mouvement syndical démocratique.
Bien qu'il n'y ait jamais eu de liens organiques entre la CISL et les SPI, ils partagent les mêmes valeurs et collaborent sur de nombreuses questions. Dès lors, ces deux types d'organisations, inter-professionnelles et sectorielles/professionnelles, sont souvent désignées comme la famille « CISL ».
Un troisième groupe d'organisations syndicales internationales est inspiré par l'enseignement social-chrétien. La Fédération internationale des syndicats chrétiens (CISC) est créée en 1920 puis remplacée en 1968 par la Confédération mondiale du travail (CMT). Bien que la CMT se considère comme spirituellement inspirée, ses membres ne sont plus uniquement des organisations chrétiennes.
Au niveau sectoriel, la FSM intègre les unions internationales syndicales (UIS), qu’elle contrôle. L’UIS Enseignement est alors, et demeure, la Fédération syndicale mondiale de l’enseignement (FISE). La CMT a également des structures sectorielles appelées « Action syndicale ». La Confédération syndicale mondiale des enseignants (CSME), après avoir fait partie d'un organisme du secteur public, devient une structure séparée pour les enseignant·e·s au sein de la CMT.
En plus de la FSM Fédération syndicale internationale de l’enseignement (FISE) et après la guerre, de l'organisme chrétien du secteur public, la Fédération mondiale des associations d'éducation (WFEA de son acronyme anglais) grandit et devient en 1946 l'Organisation mondiale de la profession enseignante. En combinaison avec d’autres organisations, elle forme en 1951 la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE). Également créé en 1951, le Secrétariat professionnel international de l’enseignement (SPIE), fait partie de la famille de CISL.
Le SPIE se considère depuis sa création comme une organisation syndicale, défendant la démocratie, et il est engagé dans la lutte des syndicats libres contre la domination du gouvernement, des employeurs, des partis politiques et de la religion. De nombreux membres de la CMOPE, à l’époque bien plus importante, se considèrent comme des associations professionnelles et non des syndicats.
En règle générale, la plupart des premières organisations d'enseignants, tant au niveau national qu'international, étaient des organisations professionnelles et non des syndicats: elles ne recherchent pas la négociation collective et ne s’y engagent pas. A cette époque, dans la plupart des pays, la loi ne permet toutefois pas aux enseignant·e·s de s'organiser, de négocier, ou de faire grève.
La situation évolue nettement après la Seconde Guerre mondiale et de nombreuses organisations commencent à s'engager dans la négociation collective, même celles qui se considéraient auparavant comme des organisations purement professionnelles.
La rivalité organisationnelle est forte, mais la coopération est présente dans certains domaines. Les différentes tendances démocratiques européennes par exemple coopèrent souvent avec difficulté. Dès 1969, un comité est créé à cet effet: le Comité syndical européen de l'éducation (CSEE). Certains syndicats nationaux qui travaillaient avec le CSEE rejoignent la CMOPE et le SPIE. L’affiliation double existe également dans les pays en développement.
Préparation à la fusion
Aux Etats-Unis, où la concurrence entre la National Education Association (NEA) et l'American Federation of Teachers (AFT) est une tradition de longue date, et où il existe de nettes différences d'origine et de conception entre une organisation professionnelle (NEA) et un syndicat (AFT), des changements se produisent également dans les deux organisations, reflétant aussi les possibilités de croissance pour l'action syndicale dans l'éducation. La NEA s'intéresse davantage, surtout dans certains Etats, à la négociation collective et l’AFT met davantage l’accent sur les questions professionnelles originelles. Dans certaines grandes villes, des fusions s’opèrent également entre les deux organisations.
L'AFT est alors membre du SPIE et son Président, Al Shanker, est également été Président du SPIE. La NEA est quant à elle membre de la CMOPE et sa Présidente, Mary Futrell, est également Présidente de la CMOPE. Ces éléments, combinés avec les événements se déroulant en Europe et ailleurs, mettent en place un environnement qui modifie la nature des discussions et conduit à l'unité.
Les dirigeants des deux principaux syndicats américains s’accordent à dire que, malgré leurs différences, ils doivent étudier les possibilités de créer une nouvelle organisation au niveau mondial. Les deux Présidents jouent alors un rôle crucial pour jeter les bases d'une fusion réussie. Les Secrétaires généraux du SPIE et de la CMOPE, respectivement Fred Van Leeuwen et Bob Harris, sont également très engagés afin de faciliter la compréhension et les bonnes relations et de balayer les obstacles à l'unification.
Fondation de l'Internationale de l'Éducation
Le 26 janvier 1993, la CMOPE et le SPIE fusionnent lors d’un congrès à Stockholm, en Suède, pour former l'Internationale de l'Education (IE). Le Président de l'AFT, Al Shanker, est élu Président fondateur de l'IE et la Présidente de l'AEN Mary Futrell, est élue Présidente de l'IE.Le Secrétaire général du SPIE Fred van Leeuwen est élu Secrétaire général et se concentre tout d'abord sur l’élaboration de toutes les structures de la nouvelle organisation. Le Secrétaire général de la CMOPE Bob Harris est élu Directeur exécutif pour les relations intergouvernementales, chargé d'établir le rôle de l'IE en tant que porte-parole des enseignant·e·s et des personnels de l'éducation.
La CSME de la CMT ne participe pas à la création de l'IE, mais prend part à un processus qui a débuté en 2004 et s'est poursuivi jusqu’en 2006. Cette même année, la CISL et la CMT mènent l'unification des organismes interprofessionnels des centres nationaux dans le mouvement syndical démocratique pour former la Confédération Syndicale Internationale (CSI).
La création de l'IE a non seulement permis de créer la plus grande et la plus puissante organisation syndicale internationale de l'histoire, mais aussi de réunir deux puissantes traditions de syndicats de l’enseignement et d’organisations professionnelles. Depuis près d'un quart de siècle, les syndicats ont renforcé leurs contributions en faveur de la défense et de l'amélioration de la profession enseignante, de l'excellence professionnelle et du développement et ont élargi la portée et l'influence des syndicats.
La fusion a apporté l’unité fondée sur un consensus autour de l'idée d'un syndicalisme libre et de la démocratie. L'organisation a également permis de réaliser d’importants progrès sur le plan politique. La nouvelle organisation a permis de faire de l’éducation gratuite de qualité pour tou·te·s et toutes une priorité de la politique mondiale.
La défense du droit à l'éducation et la défense et l'exercice des droits syndicaux ont été réunies comme jamais auparavant pour conférer à l'IE et à ses organisations membres la capacité de mieux représenter tou·te·s les travailleur·euse·s du secteur de l'éducation et pour leur donner une place à la table politique mondiale de l'éducation. La fusion de ces droits a également permis aux syndicats de l'éducation de mieux promouvoir la culture, le processus et la pratique de la démocratie.