Plusieurs rassemblements et défilés (Marche pour la science) seront organisés le 22 avril prochain à Washington et dans d’autres villes du monde. Les syndicats de l’éducation peuvent jouer un rôle essentiel au sein de cette campagne, en revendiquant notamment un accroissement du financement public pour la science, une meilleure protection des libertés académiques et un renforcement de la sécurité d’emploi pour les chercheurs/euses.
La Marche pour la science trouve son origine aux Etats-Unis où, suite au succès de la Marche des femmes, des organisations ont uni leurs forces pour lutter contre les attaques récentes et sans précédent ciblant la recherche scientifique, ainsi que les libertés académiques et la liberté de pensée, en particulier s’agissant de la recherche climatologique. A titre d’exemple, les premiers mois de l’administration Trump ont été marqués par la désignation de militant(e)s climato-sceptiques aux postes politiques clés, le rétablissement des « gag rules » ou « règles du baîllon » pour les organisations scientifiques et environnementales, et l’avancée de propositions visant à limiter les dépenses fédérales pour la science.
Si les différentes mesures prises par l’administration Trump ont déjà permis de rallier les opposant(e)s, la Marche pour la science vise, elle, à réunir un groupe diversifié et non partisan, soucieux de soutenir la science pour le bien commun. Cette initiative se donne également pour objectif de réaffirmer la valeur des politiques argumentées, ainsi que la nécessité de défendre les scientifiques, en particulier lorsqu’ils/elles sont menacé(e)s ou réduit(e)s au silence. En cette période marquée par une tendance inquiétante à faire prévaloir un discours politique dénué de toute argumentation (ère de « post-vérité »), ces principes et objectifs fondamentaux apparaissent plus importants que jamais.
Malgré sa mission de grande envergure, la Marche pour la science a néanmoins prêté le flanc à certaines critiques. Plusieurs scientifiques ont, par exemple, mis en cause le manque de références à la diversité et à l’équité dans le message initial, tandis que d’autres continuent à nourrir des inquiétudes face à un sentiment de « politisation » de la « science pure ». Pourtant, ces controverses n’ont, à aucun moment, empêché l’augmentation du nombre d’organisations participantes : plus de 100 organisations américaines ont désormais rejoint le rang des partenaires, dont l’ American Federation of Teachers.
Plusieurs dizaines de marches de solidarité internationales ou parallèles sont également prévues ce 22 avril. Ces initiatives partagent, dans une large mesure, les principaux objectifs de la campagne américaine, mais tiennent compte des spécificités locales. Au Royaume-Uni, par exemple, la communauté universitaire met en exergue les retombées négatives du « Brexit » sur la mobilité des scientifiques et sur la collaboration avec les partenaires européens, tandis que les militant(e)s en Australie demandent à leur gouvernement d’investir davantage de fonds publics dans la recherche scientifique et, plus particulièrement, dans la recherche fondamentale.
L’ Internationale de l’Education et sa région européenne, le CSEE, ont déclaré leur soutien à la Marche pour la science et plusieurs affiliés, notamment en Italie et en France, encouragent leurs membres à participer aux marches parallèles organisées au niveau local. Les syndicats de l’éducation occupent une position privilégiée pour garantir que des messages politiques plus larges, concernant la démocratie, la citoyenneté, l’égalité et la diversité, soient intégrés à cette campagne destinée à défendre le patrimoine scientifique et la recherche. En tant que syndicats représentant les chercheurs/euses dans tous les secteurs, nous avons le pouvoir de revendiquer une approche inclusive de la science, englobant les arts et les sciences humaines, ainsi que les disciplines STEM traditionnelles.
Enfin, l’opportunité nous est également offerte de souligner l’importance d’assurer de bonnes conditions de travail et, en particulier, de mettre en exergue le lien essentiel qui existe entre sécurité d’emploi et libertés académiques – une condition préalable indispensable si l’on souhaite garantir une science de qualité. Cette année marque le 20eanniversaire de la Recommandation de l’UNESCO concernant la condition du personnel enseignant de l’enseignement supérieur, la plus importante des normes internationales pour ce secteur. Cette recommandation de l’UNESCO confère aux universitaires le droit de conduire des recherches en l’absence de toute ingérence ou suppression de résultats. Elle stipule également :« Le régime de la permanence lorsqu’il existe, ou le cas échéant son équivalent fonctionnel, constitue l’un des principaux instruments de préservation des libertés académiques et de protection contre les décisions arbitraires ».
La Marche pour la science pourrait également représenter une excellente occasion pour les syndicats de dénoncer le non-respect de ces principes par nos gouvernements. Sceller des alliances avec des associations scientifiques et professionnelles, des groupes d’étudiant(e)s et le grand public le 22 avril, pourrait également contribuer à renforcer les campagnes que nous menons dans ce domaine.
Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.