Les engagements mondiaux en faveur de l'autonomisation économique des femmes ont été approuvés par les 163 Etats membres participants à la 61eSession de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies qui s’est achevée le 24 mars.
Le document final de la 61eSession de la Commission de la condition de la femme ( UN CSW61) qui s'est tenue à New York, aux Etats-Unis, du 13 au 24 mars, connu sous le nom de Conclusions convenues, reconnaît explicitement que « les progrès accomplis dans l'autonomisation économique des femmes dans un monde du travail en pleine évolution ont été insuffisants, empêchant la réalisation du plein potentiel des femmes et de la pleine jouissance de leurs droits humains, ainsi que de leurs libertés fondamentales ».
Ces remarques sont très conformes aux résultats du Rapport du Groupe d'experts publié avant la CSW61 des Nations Unies, et dans lequel il était déclaré que, malgré des résultats positifs au cours des dernières décennies, « les tendances et les indicateurs de l'emploi des femmes et de leurs conditions dans le monde du travail en pleine évolution (...) restent obstinément négatifs ».
Renforcement de l'éducation
La Commission a réaffirmé le droit à l'éducation et à l'accès à une « éducation de qualité inclusive » en tant que facteurs contribuant à la réalisation de l'égalité des genres et à l'autonomisation des femmes et des filles. Les Conclusions convenues demandent aux gouvernements de fournir un « accès universel à un enseignement de qualité, tout en assurant une éducation de qualité inclusive, équitable et non discriminatoire ».
Le document final a abordé la question de l’éducation avec fermeté. A cet égard, la Commission a lié explicitement les dépenses fiscales et une infrastructure sensible au genre pour la protection sociale et les soins. Les Etats membres ont été invités à « optimiser les dépenses fiscales pour une protection sociale et une infrastructure de soins adaptées au genre, telles que l'éducation de la petite enfance équitable, de qualité, accessible et abordable ».
Violence basée sur le genre en milieu scolaire
La Commission souligne également la nécessité d'assurer la sécurité des femmes et des filles dans les établissements d'enseignement, ainsi que pendant la durée des trajets pour s’y rendre ou en revenir. La violence basée sur le genre en milieu scolaire ( SRGBV) est reconnue comme l'un des obstacles les plus persistants à la poursuite des études chez les filles (notamment au niveau secondaire) dans différentes parties du monde. L'Internationale de l’Education (IE) est un membre actif du Groupe de travail mondial pour mettre fin à la SRGBV, qui est organisé conjointement par l'UNESCO et l'Initiative des Nations Unies pour l'éducation des filles (UNGEI). Les organisations membres de l'IE à l’est et au sud de l’Afrique ont mis en œuvre un programme commun IE/UNGEI sur la SRGBV, grâce auquel les syndicats seront renforcés et mieux placés pour aider à mettre fin à la SRGBV dans leurs contextes respectifs.
Les Conclusions convenues soulignent, en outre, que les adolescentes enceintes et les jeunes mères sont les groupes les « plus relégués », car on leur nie trop souvent le droit à l'éducation. Les Etats membres sont invités à concevoir, mettre en œuvre ou réviser des politiques éducatives afin que les adolescentes enceintes et les jeunes mères puissent rester ou retourner à l'école et finir ainsi leurs études.
Reconnaître les barrières structurelles
Dans l’introduction du document final, il est fait référence à des groupes spécifiques de femmes et de filles faisant face à des discriminations multiples et croisées et des obstacles à leur autonomisation économique, y compris des femmes et des filles d'ascendance africaine, des femmes et des filles indigènes, des femmes et des filles handicapées, ainsi que des femmes et des filles migrantes, en particulier les travailleuses migrantes. La violence à l'égard des femmes et des filles est une autre question structurelle essentielle qui est explicitement mentionnée dans les Conclusions convenues, d'autant plus que celle-ci affecte le monde du travail. Le document a également reconnu le travail de soins non rémunéré comme « un obstacle structurel aux progrès des jeunes filles et des femmes dans l'achèvement des études ».
Action collective
Les Conclusions convenues sont significatives, mais celles-ci ont émergé avec difficulté. Au cours de la deuxième semaine de négociations, les organisations pour les droits des femmes et d'autres organisations de justice sociale ont lutté pour faire entendre leurs voix lorsque des tentatives ont été réalisées pour limiter l'accès des délégués aux espaces de négociation auxquels ils avaient pu toujours accéder auparavant. Les discussions informelles entre les délégués du gouvernement et de la société civile ont été sérieusement entravées et les délégués de la société civile se sont révélés incapables de soutenir adéquatement le processus de négociation.
Les près de 4.000 activistes qui ont voyagé à New York pour s'assurer que les Etats membres adopteraient les différentes Conclusions convenues rendant possible l'autonomisation économique des femmes au plus tôt, ont refusé de reculer. En l’espace de 20 heures, près de 730 organisations ont adressé une lettre de protestation qui a permis de rétablir l'accès total aux délégués de la société civile.
Normes de l'OIT
Les délégués des Syndicats mondiaux ont également dû mobiliser une action collective au cours de la deuxième semaine de négociations, lorsque plusieurs pays ont tenté d'exclure du document final les mentions des normes de l'Organisation internationale du travail (OIT). En réponse, les Syndicats mondiaux ont publié une déclaration conjointe condamnant les tentatives de certains Etats membres visant à exclure toute référence à l'OIT dans les Conclusions convenues. Le document final contient une reconnaissance claire des normes pertinentes de l'OIT et des conventions fondamentales décrites comme « essentielles pour l'autonomisation économique des femmes ».
Rôle des syndicats
Une forte mobilisation a également été nécessaire pour garantir que le document comprendrait une mention explicite des syndicats. Ceux-ci ont été reconnus en tant qu'institutions pouvant jouer un rôle important en adoptant certaines des mesures exigées par les Etats membres pour promouvoir l'autonomisation économique des femmes et ayant un rôle clé dans le dialogue social. Leur rôle dans le traitement des inégalités économiques persistantes, y compris les écarts de rémunération entre les sexes, a été également reconnu, ainsi que la nécessité de soutenir une collaboration tripartite, afin de prévenir et de supprimer les obstacles à l'égalité des genres et à l'autonomisation économique des femmes. De même, le document reconnaît la nécessité d'encourager et de soutenir la participation des femmes dans les syndicats et le leadership des syndicats, des organisations de travailleurs et d'employeurs.
Traiter les questions en suspens
Pour la première fois, la Commission de la condition de la femme a souligné l'importance de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2008, en particulier pour les femmes et les filles. Les Etats membres sont appelés à « promouvoir l'autonomisation économique des femmes autochtones, notamment en assurant l'accès à une éducation de qualité inclusive et une participation significative à l'économie en abordant les formes de discrimination multiples et croisées auxquelles elles sont confrontées et les obstacles, y compris la violence, et en encourageant leur participation aux processus décisionnels pertinents, à tous les niveaux et dans tous les domaines, tout en respectant et protégeant leurs savoirs traditionnels et ancestraux. » Il s'agit d'une inclusion importante qui sera examinée plus en profondeur lorsque la Commission se réunira en 2018 pour mettre l'accent sur l'autonomisation des femmes et des filles autochtones.