La lutte pour améliorer le statut des enseignant(e)s en Algérie a été abordée lors de la rencontre entre l’Internationale de l’Education et des représentant(e)s d’un de ses affiliés algériens à la récente Conférence internationale du travail de Genève en Suisse.
« Le gouvernement algérien doit mettre fin au statut précaire des enseignants contractuels et entamer un véritable dialogue social, plutôt que de recourir à la violence pour mettre fin à des protestations pacifiques, » a déclaré Lalia Djaddour du Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique (SNAPAP).
Le 31 mai, elle est intervenue devant la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du travail lors de la discussion sur le rapport du Comité conjoint OIT-UNESCO d'experts sur l'application des Recommandations concernant le personnel enseignant (CEART).
Protestations violemment interrompues par la police
Les enseignant(e)s contractuel(le)s ont formé un comité de coordination dont le SNAPAP est membre. Ce comité a décidé d’entamer une marche de 215 km entre Béjaïa et la capitale Alger. Mile enseignant(e)s contractuel(le)s y ont participé.
La marche a débuté dans le calme le 27 mars. Toutefois, la police a bloqué son avancée dans la ville de Boudouaou près d’Algers. Les enseignant(e)s ont alors décidé de protester et organisé un sit-in et une grève de la faim. Après 15 jours, les forces de police ont violemment interrompu ce sit-in, forcé les manifestant(e)s à monter dans des bus pour les emmener dans des régions reculées du pays où ils les ont laissé(e)s à leur sort.
« Nous estimons que notre cause est juste, car sans de bonnes conditions de travail dans le secteur public, la qualité de l’éducation de nos enfants ne s’améliorera pas, » a insisté Djaddour. « C’est pourquoi nous sommes ici à l’OIT pour soutenir l’avenir de l’éducation de nos enfants et nous remercions l’Internationale de l’Education pour tout son travail pour protéger les droits des travailleuses et travailleurs et l’enseignement public de qualité. »
Conditions défavorables
Quelques 90.000 enseignant(e)s permanent(e)s sont employé(e)s dans l’enseignement primaire et secondaire en Algérie. Ils/Elles disposent d’une garantie d’emploi, d’un droit à des congés payés, d’une assurance santé et d’un congé de maternité rémunéré pour les femmes. Toutefois, en 2016, 30.000 enseignant(e)s contractuel(le)s, qui représentent un tiers du personnel enseignant dans le secteur public, sont employé(e)s via des contrats à durée déterminée et n’ont droit à aucun avantage. Dès lors, les enseignantes contractuelles n’ont pas droit à un congé de maternité et elles sont nombreuses à reprendre le travail quelques jours après la naissance de leur enfant pour des raisons financières, a expliqué Djaddour.
Le droit à un poste d’enseignant permanent est une revendication de longue date des syndicats algériens, a-t-elle déclaré. En 2012, dans le sillage du Printemps arabe, le gouvernement a régularisé de nombreux enseignants contractuels, mais leur nombre a depuis lors malheureusement de nouveau augmenté.
Un enseignement public sous-financé
Djaddour a déploré le mauvais financement du secteur algérien de l’éducation et a noté que c’est « un pays riche et pourtant, les conditions dans les écoles sont parfois vraiment très mauvaises ». Dans les régions reculées, il n’y a pas de chauffage pendant l’hiver, les moyens de transport scolaires sont défaillants et les enfants doivent marcher de longues distances. Elle a également souligné qu’il peut y avoir plus de 50 élèves dans une classe de primaire et que les enseignant(e)s font face à une forte pression administrative avec peu de temps pour préparer leurs leçons.
Elle a déclaré que les inspecteurs scolaires sont « davantage comme la police », ils ne sont pas intéressés par la qualité de l’enseignement public, mais considèrent que leur rôle est de contrôler les enseignant(e)s et s’assurer qu’ils ne font pas difficultés au gouvernement.