La réunion annuelle de coopération au développement a réuni 37 participant(e)s issu(e)s de 13 pays, les 12 et 13 novembre, à Bruxelles, en Belgique. Une des six séances a permis aux participant(e)s de faire le point sur l'impact de la crise économique sur le financement et les activités de la coopération au développement, et de discuter des solutions à envisager.
« L'ordre du jour de cette réunion a été élaboré de façon à examiner l'impact de la crise économique et financière sur la coopération au développement », a dit le Secrétaire général de l'IE, Fred van Leeuwen, lors de ses commentaires d'ouverture. « Il est essentiel d'élaborer de nouvelles stratégies, afin d'atténuer les effets de la crise. »
Les nouvelles initiatives de l'IE pour faire avancer le travail de la coopération au développement
Van Leeuwen a souligné trois initiatives cruciales de l'IE relatives à l'éducation dans le cadre de la coopération au développement:
- Le réseau des responsables de la syndicalisation, par le biais duquel l'IE essaie de mobiliser l'expertise disponible au sein des organisations membres, en vue d'élaborer des stratégies;
- « Occuper l'éducation », un nouveau programme visant à renforcer l'impact des syndicats d'enseignants sur le dialogue social; et
- Le Partenariat mondial pour l'éducation (GPE) auquel les organisations membres sont encouragées à participer.
« Le développement des capacités est la partie la mieux financée du programme de l'IE », a reconnu van Leeuwen. « En Birmanie, par exemple, il est vital d'accroître notre travail, afin de soutenir le mouvement syndical émergent. Dans ce pays, nous devons commencer à zéro. »
Ailleurs, au Brésil et en Argentine, les syndicats de l'éducation deviennent des acteurs majeurs de la coopération au développement, et la participation des représentant(e)s de leurs syndicats à la réunion a été particulièrement remarquée.
Van Leeuwen a également indiqué que l'IE continuerait à soutenir ses réseaux régionaux de femmes, des outils très précieux dans le travail de coopération au développement. Il a rappelé aux participant(e)s l'Initiative « L'éducation avant tout », entreprise par le Secrétaire général des Nations Unies, en réitérant son importance dans le cadre des cinq priorités de l'IE(en anglais).
Canada: La crise sert d'excuse pour réduire les dépenses en matière de coopération au développement
Richard Langlois, de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) était le premier orateur de la première séance relative à « L'impact de la crise économique mondiale sur la coopération au développement ».
« Au Canada, l'Aide officielle au développement (AOD) a été réduite de 5,3% en 2011, pour la première fois depuis 1997 », a-t-il dit. « L'objectif de consacrer 0,7% du PIB canadien à la coopération au développement devient moins probable. L'AOD diminue de manière générale dans presque tous les pays, en dépit des engagements gouvernementaux envers la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement à l'horizon 2015. »
Il a déclaré que ce n'était pas une question de crise économique: « C'est juste une excuse du gouvernement pour poursuivre son programme politique ».
En 2011, la CSQ a perdu 200.000 $ CA pour les activités de coopération au développement.
Langlois a également déploré le fait que l'Agence canadienne de développement international (ACDI) suive les priorités gouvernementales en matière de politiques étrangères et commerciales. Les syndicats doivent attendre que l'ACDI lance un appel à propositions pour soumettre un projet.
Il a expliqué que, l'année dernière, aucun syndicat n'avait bénéficié d'une subvention émanant de cette agence. Par conséquent, un certain nombre de partenariats avec des pays du sud avaient dû être suspendus.
Le 13 novembre, la CSQ, soutenue par d'autres syndicats de l'éducation et une ONG, le Centre américain pour la solidarité syndicale internationale, a tenu une conférence de presse pour exhorter le gouvernement conservateur à entreprendre davantage de travail de coopération au développement.
La CSQ soutient également la création d'une nouvelle agence québécoise. Celle-ci entreprendra la création de consortiums avec des ONG et d'autres syndicats québecois, et cherchera d'autres sources de financement autonome pour les activités de la coopération au développement.
Pays-Bas: Les alternatives de financement pour les activités de la coopération au développement
Trudy Kerperien, d'AOb/Pays-Bas, a déclaré que, dans son pays, la crise économique n'est qu'une excuse pour couper davantage dans le financement de la coopération au développement: « Depuis au moins dix ans, les relations sont tendues, et une campagne est menée par les forces politiques contre la coopération au développement et relayée par les médias. »
La presse a dressé un portrait négatif de l'AOD, en disant de manière erronée qu'elle représente 20% du budget national.
« Une évaluation des activités de coopération au développement a eu lieu, mais les décisions ont déjà été prises, comme si les résultats étaient négatifs », a dit Kerperien. « Mais ils sont en fait positifs. Vingt-neuf pour cent des personnes interrogées ont dit qu'elles étaient satisfaites. »
Parce que le budget de la coopération au développement a été divisé par deux, les Pays-Bas doivent changer leurs stratégies, a-t-elle souligné.
Elle a dit que la confédération, dont AOb est membre, a toujours un budget de coopération au développement, bien que celui-ci couvre des pays et des domaines limités - l'éducation n'étant pas officiellement reconnue. Par ailleurs, AOb peut utiliser son propre fonds de solidarité syndicale, étant donné que 0,7% des cotisations qu'elle perçoit va aux activités de coopération au développement. C'est par conséquent un fonds stable et croissant.
« La Confédération essaie maintenant de trouver d'autres sources de financement, comme de recevoir des héritages ou des collectes de fonds de leurs membres », a ajouté Kerperien. « Elle cherche à coopérer avec des donateurs inhabituels, tels que la loterie ou d'autres ONG. »
Elle a ajouté qu'AOb axait désormais son travail de coopération au développement sur d'autres aspects: « Maintenant, nous axons notre travail sur des actions à court terme, qui auront des effets sur l'avenir. Nous essayons de connecter les partenaires du sud entre eux, de façon à ce que la coopération soit plus efficace. Et nous soutenons les partenaires pour qu'ils trouvent leurs propres plans de financement. »
Canada: Les effets négatifs des coupes budgétaires en matière de coopération au développement
Durant la séance, Alex Davidson de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants (FCE) a soulevé la question des pensions, en disant que les fonds de pensions subissaient actuellement énormément de pressions.
« L'ACDI est devenue une organisation au service des corporations », a-t-il dit. « Les syndicats et les organisations d'enseignants ne reçoivent pas ces fonds. »
Il a également souligné que l'effet de ce changement d'objectifs de l'ACDI à propos de l'éducation au Canada et à l'étranger est prononcé, et conduit à la marchandisation et à la déprofessionnalisation de l'enseignement.
Davidson a indiqué que la tentation était grande d'élaborer des objectifs à court terme qui fausseraient les valeurs ou les bonnes pratiques.
Soulignant que la FCE recherche d'autres sources de financement, étant donné que son autonomie en matière d'activités de coopération au développement est en péril, il a expliqué que des fonds peuvent provenir de fondations ayant un programme acceptable. Il a ajouté qu'il était d'accord de s'intéresser davantage à la coopération sud-sud, y compris aux initiatives de développement des capacités.
« Il est important que la FCE conserve son influence au Canada », a-t-il dit. « Nous devons rester forts, unis et chercher des alliances avec la société civile. L'opinion publique change lorsqu'il y a une compréhension générale du travail de développement. »
Bâtir des consortiums au niveau européen
Martin Rømer, Directeur de la région européenne de l'IE, le Comité syndical européen de l'éducation (CSEE), a indiqué que seulement quelques pays européens étaient capables actuellement d'effectuer du travail de coopération au développement.
« Nous devons chercher de nouveaux fonds et nous adapter à un monde en mutation », a dit Rømer. « Le CSEE essaie d'aider les affiliés des pays d'Europe orientale. Nous examinons les programmes de la politique de voisinage et les fonds structurels, entre autres, comme possibilités de financement. »
Il a reconnu que, souvent, il est trop compliqué pour les organisations de solliciter seules des fonds européens. Il est par conséquent nécessaire de bâtir des consortiums.
« Quelles sont les possibilités de devenir assez importants pour obtenir des fonds de manière durable? », a-t-il demandé. « Nous devons conseiller aux affiliés de travailler davantage au niveau national, afin de constituer des fondations ou des consortiums. Nous devons également explorer le programme EuropeAid dans son intégralité, et vérifier que l'éducation est mentionnée dans des accords concrets, en tant que domaine de travail. »
Il a regretté que, parfois, les syndicats doivent obtenir un accord national, afin de recevoir un financement européen. Et cela peut constituer un problème, si le gouvernement concerné s'oppose à cette possibilité.
Rømer a ajouté qu'il convient d'explorer la possibilité de recevoir des fonds émanant de fondations privées. Il a demandé aux affiliés d'être plus clairs dans leurs objectifs et de réformer les structures de la coopération au développement.
L'ordre du jour de la réunion de coopération au développement est disponible ici